J'en ai marre. Marre de m'attendre systématiquement à être déçu par un nouveau film de Dolan ; et l'être systématiquement. Marre d'avoir l'impression que chaque nouvel opus est un énième "premier film" oscillant entre figure de style et démonstration d'une envie tapageuse de plaire en livrant un objet filmique d'une esthétique tellement étirée qu'elle retire à l’œuvre la substance qui en ferait un vrai film de cinéma.
Car s'il y a parfois du cinéma dans Juste la fin du monde, il y a aussi cet amoncellement de défauts dolaniens qui me font si habituellement tiquer. A commencer par cet universalisme raté caché sous les traits d'un cocon familial meurtri et qui n'arrive jamais à s'extirper du formalisme dans lequel il est emprisonné. Ce casting qui peut aller du tout au rien, avec ici ces stars pas toujours au mieux de leur forme qui se la jouent façon Cassavetes en dérapage contrôlé ; Cotillard joue Cotillard qui joue la bafouilleuse de service, Cassel joue Cassel qui joue le mec à fleur de peau, Seydoux joue... ce qu'elle peut (vous savez, l'école de la vie, tout ça), Baye joue... ce qu'on lui donne, Ulliel joue peu, et c'est encore ce qui lui reste de mieux à faire. Ce texte original - au risque de heurter les connaisseurs de Lagarce, que je ne suis pas - qui m'a ennuyé prodigieusement...
Lorsqu'on avoue (souvent à demi-mot) ne pas aimer le travail de Xavier Dolan, on se fait très vite traiter de sans-cœur, d'inhumain salopard. Et pourtant, précisément, je trouve que ce film n'a pas de coeur. C'est un film clinique. Qui ne peut recevoir d'honneur qu'en étant jaugé point par point (mise en scène, image, musique, bla bla bla), car l'ensemble n'est pas un bloc. Il y a de belles choses dedans, de véritables moments de grâce comme la scène finale du coucou qui "sauve" un peu le film, mais on ne me fera toujours pas dire que Dolan, bien que bon orfèvre, est le génie qu'on nous vend ; ou du moins pas encore.