Je crois qu'aucune production n'a suscité autant de peur que d'hilarité générale avant celle de Justice League. La Warner ayant commencée trop précipitamment son DC Extented Universe (qui n'a pas de véritable nom officiel je le rappelle) dans le seul et unique but de concurrencer son voisin Marvel, qui lui avait prit son temps pour donner des bases solides à son univers, a finit par sombrer dans les pires méandres de ce qu'on aurait pu imaginer. Les choix scénaristiques douteux pour lesquels ils optaient dans leurs quatre précédents films nous ont tous énervés et confus, Justice League va presque nous donner envie de les regretter.


Univers démarré trop rapidement, films solos absents, joie des acteurs fondant comme neige au soleil, ligne narrative en perpétuels changements, éviction de Zack Snyder pour tragédie familiale, reshoots à tout va par Joss Whedon parachuté en catastrophe, travail de Zack Snyder charcuté, humour fun à la Marvel, coupures gigantesques au montage, Junkie XL remplacé par Danny Elfman, personnages supprimés, posters immondes, bandes-annonces indécises, durée raccourcie pour caser un maximum de séances. Une production calamiteuse que la Warner désespérée cherchera à tout prix à cacher derrière la mention du "tout va bien" allant même jusqu'à désavouer le boulot de Snyder sur cette saga. Certes c'était très moyen mais au moins il y avait une identité derrière.
Tout ça n'est que le début de ce qui est sûrement l'un des plus gros gâchis artistiques de toute l'histoire des blockbusters.


Le début du film viendra nous donner un faux-semblant d'espoir avec ses ralentis propres à Snyder avant de couler net quand les répercussions de Batman v Superman seront balayés aussi sec au profit d'une invasion extra-terrestre sans pouvoir développer quoi que ce soit en termes d'atmosphère voir même d'univers. Inutile d'espérer les thématiques que la Warner souhaitaient vendre avec sa saga, tout ici est vulgarisé à l'extrême pour satisfaire le public de bas-étage que s'imaginent les producteurs exaspérés de ne pas obtenir de lauriers assez vite.
L'histoire s'en retrouve réduit au minimum tant dans la durée que dans le contenu. Avengers peut dormir tranquille puisque même son scénario n'atteint pas le niveau de simplisme de Justice League qui croit visiblement qu'il suffit de réunir cinq personnages en costume pour atteindre la grandeur.


A force de vouloir concurrencer le Marvel Cinematic Universe, Warner a complètement bâclé la construction de son univers pour tenter de réunir le plus rapidement possible son équipe de super-héros phare sans réellement comprendre ce qui fait fonctionner cette recette.
On a tous parlé des scènes ridicules tels que le rêve apocalyptique de Bruce Wayne et du caméo de Flash. Je vous rassure, ces scènes là n'ont servies à rien du tout, de même que le malheureux Lex Luthor coupé au montage (merci pour ça).


Cette absence totale de direction se ressentait déjà quand on a su qu'Aquaman, Flash et Cyborg n'auraient pas droit à leurs films solo. Crainte justifiée. Les trois personnages n'auront droit qu'à 10 voir 5 minutes d'exposition avant d'intégrer la League. Une fois passées, ils ne se limitent par la suite qu'à des rôles fonctionnels sans que leur personnalité ne viennent donner à l'histoire un semblant de relief à l'exception de Flash dont les blagues viennent constamment casser l'ambiance et qui n'a techniquement aucune raison d'intégrer le groupe. Cyborg ne sert qu'à la toute fin et Aquaman passe pour un touriste tant son implication dans l'histoire se limite à peu de chose.


L'antagoniste viendra enfoncer le clou dans ce beau gâchis. Steppenwolf incarné par un pauvre Ciaran Hinds défiguré au numérique réussit l'incroyable exploit d'égaler l'Enchanteresse de Suicide Squad en terme de profondeur. Ce tas de CGI dans la lignée de ses prédécesseurs n'est rien de plus qu'un simple porte-flingue sans personnalité uniquement destiné à faire réunir les héros sous sa coupe


(sa mort est d'ailleurs d'un ridicule affligeant)


, donnant au passage l'impression que le film n'a servi à rien du tout. Le pire méchant que cette saga a eu à proposer.


Inutile d'espérer quoi que ce soit du côté de Superman dont le retour était très attendu bien que prévisible. Si tout laissait penser que le super-héros passerait du côté obscur, son retour en revanche fera saigner des dents ceux qui espéraient voir sa mort dans Batman v Superman servir à quelque chose.


Ressuscité beaucoup trop tôt (à peine la moitié du film) et n'ayant rien à voir avec l'histoire, son apparition arrive comme un cheveux sur la soupe cassant complètement la peur que l'on peut ressentir pour les personnages par la suite une fois qu'il rentre dans le rang (il met d'ailleurs un temps fou à arriver sur le champ de bataille final). Tout ce qui a été construit autour du personnage, la peur des concitoyens quant à sa toute-puissance, sa mort symbolique censée donner espoir à l'humanité, tout ça n'aura servi à rien du tout.
Snyder et Whedon n'ont même pas le mérite de rendre importante la menace qu'il représente pour la League qui ne se limite qu'à une seule scène d'action d'à peine deux minutes sans la moindre dose de spectaculaire.


Réussir à rater ça alors que tout était présent pour y arriver, chapeau !


On pourra d'ailleurs en dire autant de la mise-en-scène et du ton employé. Le visionnage devient même amusant, c'est presque ludique de déchiffrer quelle scène à été réalisée par telle ou telle personne. Le climax du film en Russie est un véritable festival à ce niveau tant les scènes comiques de Joss Whedon et le sérieux de Zack Snyder ne se mélangent absolument pas. Le facepalm n'est pas loin.


On pourra ressentir ça grâce à la musique ô combien molle de Danny Elfman. Noyée sous des tonnes d'instruments qui enchaînent les notes sans imagination pour un maximum de bruit et qui serait complètement oubliable si il n'y avait pas les placements "subtils" du main thème de Batman de 1989 et du thème Superman de John Williams qui n'ont rien à foutre là. Le boulot de Junkie XL était certes mauvais mais au moins il y avait une certaine recherche. Le compositeur de Tim Burton est définitivement sur le trottoir à vouloir nous faire plaisir en nous sortant ce qui faisait sa grandeur. Et en faisant ça, il retire à Justice League le peu d'identité qu'il lui restait !


Apparemment c'était trop "sombre", quoi de plus normal donc que tout coloriser et tout rendre fun avec des personnages s'échangeant des punchlines en pleine action comme n'importe quel Marvel ? Les scènes d'actions ne pourront d'ailleurs contenter personne. Aucune mise-en-scène pour rendre les combats immersifs, tout est filmé de façon plan-plan sans la moindre énergie, à peine se souviendra-t-on des envolées véloces de Flash trop courtes pour marquer.


Si le fan ne s'est pas encore étranglée à ce moment-là, il pourra en revanche se crever les yeux devant les CGI absolument immondes du film. Le rendu de Cyborg a dix ans de retard, Steppenwolf ressemble à n'importe quel méchant de blockbuster, tout le climax est laid en tentant vainement de camoufler le travail raté des reshoots derrière une charpie d'effets visuels pas finis pour alourdir inutilement le cadre. De quoi rendre nostalgique de l'horrible même climax que constitue leurs précédentes productions.


On pourra conclure le film en enchaînant l'hilarité et la gêne générale grâce aux deux scènes post-génériques confirmant une bonne fois pour toute l'identité de bidon de lessive que cette saga possède réellement


(je vous mets au défi de ne pas rire devant le maquillage raté de Joe Manganiello en Deathstroke).


Ainsi que faire le tri pendant le générique de fin sur les (très) nombreuses scènes des bandes-annonces qui sont soit absentes, soit remplacées. Et peut-être même se rappeler des très nombreuses idées (bonnes ou mauvaises) des précédents films, reniées ou tout simplement oubliées.


Bilan de tout ça ? Catastrophique ! Mais en même temps c'était prévisible.
Les producteurs de cette saga ont dévoilés leur véritable visage de requins prenant définitivement leur public pour des attardés (une fois de plus). On pourrait croire qu'égaler Marvel serait facile mais en réalité il y a eu tout un travail pour parvenir à ce résultat. Travail que la Warner a été trop feignante et impatiente pour accomplir quoi que ce soit en traitant ce qui était l'un des projets les plus attendus de plusieurs décennies en vulgaire blockbuster sans âme. Ils ne sont pas les seuls fautifs, toute l'équipe derrière le sont pour couvrir un tel ramassis de signes avant-coureur (qu'ils se donneront une joie de révéler après la réception catastrophique que le film va avoir pour faire genre qu'ils suivent le mouvement alors qu'ils auront été hypocrites du début à la fin).


Est-ce de la faute de Zack Snyder ? De Joss Whedon ? Des producteurs ? Honnêtement on s'en fiche car il est évident maintenant que cette saga n'aura que ce qu'elle mérite à force de faire passer leur crétinerie pour du respect. A faire passer des idées douteuses pour des idées "cinématographiques". A faire croire qu'il y aura de la "personnalité" alors qu'ils ne font que répéter ce que tout le monde ne cesse de réclamer pour mieux nous contenter et nous complaire. Tout remettre à plus tard comme d'habitude dans le seul et unique but de privilégier la quantité au détriment de la qualité (et que dire du possible rebootage par Flashpoint et de ce nouveau label DC censée nous vendre des films "d'auteurs" ?).


C'est définitif, on ne se souviendra du DC Extented Universe (si tant est qu'on l'appelle toujours comme ça) que comme l'une des plus grosses farces du blockbuster moderne. La Warner va s'en prendre plein la gueule d'ici quelques années et heureusement, ça ne sera pas volé.

Housecoat
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le 15 nov. 2017

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