Il était une fois Ralph Ziman, un type ayant regardé "Kite", un anim' japonais noir et hyper-violent autour de l'histoire de Sawa, une jeune fille au passé tragique qui devient une tueuse à gages associée à un policier pour éliminer tout un tas de types déviants (pour simplifier à l'extrême).
Des années plus tard, ce même bonhomme se retrouva on ne sait comment à la tête de l'adaptation cinématographique de cette oeuvre. Le souci c'est qu'apparemment, il ne se souvenait que des noms des personnages et de quelques scènes. "Pas grave" se dit-il en pleine montée de LSD (il ne peut en être autrement), il décida de réécrire le tout à sa sauce en ayant l'idée complètement démente de placer cette histoire dans le contexte d'une dystonimperie hystérique où des gangs pulluleraient dans les villes après l'effondrement des gouvernements et des forces de police. Hormis le fait de bondir sur les murs comme des sauterelles yamakasis, l'activité de ces drôles de gugusses consisterait à enlever tous les enfants qui leur passent sous la main pour le compte d'un grand méchant, "l'Emir", un féru du trafic d'êtres humains. Et, vous l'avez deviné, c'est là qu'interviendrait Sawa pour tuer tout ce petit monde...
Ni une, ni deux, Ralphie prit sa plus belle caméra, embarqua mystérieusement Samuel L. Jackson dans cette étrange affaire (un pari de fin de soirée arrosée semble la meilleure hypothèse) et sauta dans le premier avion pour aller tourner dans le pays qui lui rappelait esthétiquement le plus le Japon...: l'Afrique du Sud. Oui, l'Afrique du Sud, on ne saura jamais trop pourquoi mais on peut supputer que le n'importe quoi dans lequel il s'était engagé n'avait désormais plus de limites...
Et le résultat à l'écran est à la hauteur de ces intentions ubuesques : d'un polar violent et sombre comme la nuit typiquement japonais, "Kite" passe au statut de bidule invraisemblable aux fortes allures de production made in Luc Besson futuriste et ultra-affreuse. Réalisée avec les moignons d'un manchot aveugle (l'ami Ralph se donne en effet pour but ultime d'enchaîner tous les effets de caméra les plus artificiels et immondes possibles), cette adaptation n'a de cesse d'enlaidir tout ce qu'elle peut tenter de nous raconter entre des séquences d'action invariablement loupées par leur mollesse (on sauvera quand même le côté cartoonesque de certaines exécutions mais cela tient plus à l'oeuvre d'origine qu'autre chose) et une interprétation qui, tout en lorgnant du côté haut-en-couleur des personnages de manga, s'enfile la quasi-totalité du temps dans cette frontière magique entre le ridicule et la gêne.
Évidemment, vous retrouverez tout de même quelques similarités avec l'anim' ici et là (l'intro, la scène avec les jumeaux ou encore la relation entre Sawa et Aker, il faut bien justifier le côté adaptation aussi) mais l'intrigue de fond a été tellement vidée de sa substance pour devenir un truc à twist idiot dans un contexte des plus risibles que toute tentative d'impliquer le spectateur dans ses enjeux tombent irrémédiablement à l'eau. Et mieux ne vaut même pas aborder l'aspect trash du matériau d'origine, ici mis sous la muselière aseptisée occidentale rendant ce film encore plus inutile qu'il ne l'est déjà...
En plus de cumuler tous les mauvais choix artistiques existants, "Kite" s'octroie le droit de pulvériser l'oeuvre d'Yasuomi Umetsu dont il s'inspire d'une manière qui en deviendrait presque impressionnante tant le résultat parvient à échouer sur absolument tous les tableaux. Fans & néophytes, passez tout simplement votre chemin.