Dans les bas fonds du cinéma d'exploitation déjà pas toujours des plus reluisant on trouve quelques sous genres qui ne sont pas toujours des plus faciles à défendre à commencer par la Nazisploitation ou Nazi Porn. Si l'un des tout premier film estampillé de ce sous genre semble être Le Camp Spécial N°7 de l'américain Lee Frost , c'est pourtant le très respectable Portier de Nuit de Liliana Cavani qui sera l'inspiration de toute une vague de films essentiellement italiens et typique des années 70 qui combineront avec voyeurisme de manière opportuniste les thématiques classiques du film de femmes en prison à une violence la plus souvent basée sur la torture, la domination, le sado-masochisme et l'humiliation. Si le haut du panier contient quelques films si importants qu'ils échappent même au sceau un peu infamant de la Nazisploitation comme Salo ou les 120 Jours de Sodome de Pasolini, Portier de Nuit et dans une moindre mesure Salon Kitty de Tinto Brass, on trouve derrière toute une vague de films bien moins respectables car bassement orientés vers des pulsions pour le coup bien moins intellectuelles et historiques que leurs illustres modèles. Lorsque ce brave Bruno Mattei réalise coup sur coup en 1977 Hôtel du Plaisir pour SS et KZ9 Camp d'Extermination c'est bien moins pour dénoncer les horreurs du nazisme que pour montrer un maximum de filles à poil subissant tortures, viols et infamies.
KZ9 – Lager di Stermino nous plonge donc dans les horreurs du camp de Rosenhaussen dans lequel le troisième Reich tente diverses expériences médicales afin de perpétuer les idées du Führer et la domination de la race aryenne. La jeune Maria Blake (Lorraine de Salle vue dans Cannibal Ferox Ou La Maison au Fond du Parc) arrivée avec de nombreuses prisonnières se retrouve contrainte de travailler avec un docteur sur de sinistres expériences.
Sans doute conscient que son casting de brunes piquantes et de beautés latines en jolies formes n'est pas très judaïque Bruno Mattei nous explique d'emblée que ses femmes se retrouvent déportées parce qu'elles sont des lesbiennes, communistes et prostituées de bas étages (ce qui fait déjà beaucoup) et qu'elles constituent de ce fait du matériel médical tout frais. Et niveau médecine, faisant fi du serment d'Hippocrate, nous assisterons à quelques expériences extrêmes qui n'ont vraisemblablement pas été sélectionnées par Bruno Mattei pour la pertinence des données scientifiques et anatomiques proposées à l'écran. Flirtant ouvertement avec la nécrophilie on tente dans le film de ranimer un soldat mort de froid par le contact charnel de deux prostituées hollandaises toute nues, une expérience qui échouera lamentablement avant qu'une française n'entre en jeu et parvienne enfin à réveiller le mort sur fond de violon sous le regard ému d'officiers à la lèvre tremblotante devant le savoir faire made in France. Bien sûr Bruno Mattei fait rarement dans la dentelle et malgré le poids écrasant de son contexte historique qui ne s'y prête guère le film prête lui souvent à sourire devant sa bêtise et ses excès les plus caricaturaux. Ainsi lorsque le régime nazi entreprend une thérapie de conversion pour deux homosexuels représentés finement par des types qui font du tricot dans une chambre d'hôpital, on leur envoie alors trois femmes nues qui les allument en dansant et prenant des poses lascives ce qui provoque chez les deux malheureux déviants des grimaces et des spasmes digne d'un exorcisme pendant que les généreux nazis s'amusent du spectacle avec des sourires carnassiers. Je veux bien qu'on ne rigole pas avec des sujets sérieux mais franchement c'est Bruno qui a commencé... C'est comme cette malheureuse à qui on a brisé la jambe en trois morceaux et explosé la rotule juste pour voir sir ça pouvait guérir tout seul; je veux bien compatir à sa douleur mais pourquoi ce dialogue lorsqu'elle demande au docteur « Dites moi je vais boiter plus tard ?? » . Et puis niveau personnages finement ciselé il y-a Kurt un prisonnier légèrement débile et obsédé qui sert d'homme à tout faire au soldats, un chauve avec une dent tout les deux mètres qui grimage et tire la langue en roulant des yeux dès qu'il voit une femme dans la chaleur moite de l'enfer carcéral.
Et finalement KZ9 Camp d'Extermination n'est jamais aussi agréable à regarder que lorsque le film prête ouvertement à sourire de se maladresses comme lorsque les nazis cachés derrière des arbres retrouvent des fuyards en les rouspétant d'avoir du les chercher toute la matinée. Car lorsque le film se fait plus sérieux revient l'inconfort d'un divertissement basé sur l'une des plus horrifiante page de l'histoire. Comme souvent pour les films de la Nazisploitation , Bruno Mattei tente de porter un message un poil opportuniste et hypocrite sur la résistance, le devoir de mémoire et le sens de l'histoire à l'image d'un final presque émouvant durant lequel des pionnières à genoux entonnent un chant de résistance face à une exécution sommaire mais personne ne sera dupe, le genre exploite simplement ce cadre historique pour tout le voyeurisme malsain qu'il implique. Et lorsque le réalisateur utilise de véritables images des camps de la mort, le frontière entre fiction crapoteuse et réalité horrible devient si poreuse que le film pose de vrais questions morales bien plus inconfortables que le sourire que sa bêtise provoque.
Difficile donc de noter objectivement KZ9 Camp d'Extermination qui m'aura souvent fait sourire puis presque regretté de l'avoir fait quelques instants plus tard. Et même si la nazi reste une figure de méchant emblématique toujours très présente dans le cinéma de genre, ce n'est sans doute pas un hasard si la Nazisploitation a elle quasiment totalement disparue des écrans depuis 40 ans.