Premier long-métrage de Michael Dacheux, la fable néo-réaliste qu’est L’AMOUR DEBOUT est une franche réussite et une déclaration d’amour au cinéma.


Le long-métrage de Michael Dacheux, au premier abord, est un film doux, cocasse et frais, qui nous emmène dans un Paris déconnecté de sa réalité, où se mêle histoires d’amour et histoires de cinéma. Le film raconte entre autres l’histoire de Léa (Adèle Csech) , jeune guide touristique à Paris, et de son ex-compagnon, Martin (Paul Delbreil), monté à Paris pour la reconquérir et tenter sa chance dans le cinéma…


L’AMOUR DEBOUT, UNE ORGANISATION PARTICULIÈRE


Après une séance-débat en présence du réalisateur, celui-ci a confié que ce film avait une structure assez particulière, puisqu’il se tournait un weekend par mois pendant dix mois. Le déroulé du film, chapitré en saisons, est donc le déroulé du tournage également : cela a permis aux acteurs d’avoir un travail à coté, mais aussi de jouer sur le naturel de leurs rencontres. Presque auto-financé, le film de Michael Dacheux aurait eu un tout autre propos si sa structure et son organisation n’avaient pas été comme cela. Il fallait, selon lui, connaître les lieux de tournage comme sa poche, et se débrouiller sans autorisations.


On retrouve, grâce à cette organisation, un esprit d’aventure dans le film et, à notre grande surprise, la découverte du quotidien dans une précarité du monde socio-culturel auquel le réalisateur a appartenu. Michael Dacheux a en effet fait des études de cinéma à l’Université Paul Valéry de Montpellier avant de réaliser un moyen-métrage appelé Sur le départ. Il travaille ensuite sur des films d’atelier avec la Cinémathèque Française. Ce parcours a une influence certaine sur son dernier film, qui montre un cinéma qui a du mal à se regarder, à assumer sa part précaire.


UN CINÉMA NATUREL


L’AMOUR DEBOUT est une ode à la création, à l’envie de faire partie de ce monde du cinéma. Il est plein d’empathie envers ses personnages, et laisse entrer le temps, les saisons, la météo et l’improvisation des acteurs dans son déroulement. Comme le temps réel était aussi vrai pour les acteurs, on assiste au fur et à mesure du chapitrage du film à de vraies retrouvailles. Le réalisateur ne voulait pas d’un film centripète mais plutôt un exemple de communication : L’AMOUR DEBOUT se veut un cinéma du réel, du monde. Il est conscient de sa porosité et de son entremêlement de fiction et de documentaire.


Le réalisateur a aussi mis en avant son envie de ne pas faire apparaître de conflits et de crises à l’écran. Il tenait à filmer des blocs de présent, des rendez-vous, des rencontres, qui ensemble faisaient avancer le récit.



On joue à faire un film […] le cinéma est une machine hiérarchique où
l’on ne fait plus rentrer de vie dans les plans.



Dans L’AMOUR DEBOUT, l’ordinaire devient extraordinaire. Il emprunte aux codes du néo-réalisme italien , et très vite, on s’attache aux petites choses de la vie que la caméra de Michael Dacheux aime montrer. L’aventure n’a ici rien de spectaculaire mais laisse s’exprimer ce cinéma de l’artisanat, de l’amateurisme, ce cinéma nu qui résulte de l’expérience des films d’atelier. Ce que le réalisateur désirait questionner était cet héritage socio-culturel auquel nous pouvons nous identifier dans le film.


MUSIQUE ET INTIMITÉ


Coté musique, le réalisateur mélange les styles. Il passe de Maurice Ravel pour les les moments de déambulation à Robert Schumann, qui lui accompagne davantage les élans du coeur et du corps. Il présente également la musique d’un de ses acteurs, Jean-Christophe Marti, par une petite pièce instrumentale et vocale, cocasse, lunaire mais organisée.


Enfin, il était important de connaître la signification de ce titre. L’AMOUR DEBOUT, c’est faire l’amour avec un homme, de manière frontale et sans intimité : et c’est aussi une quête du personnage de Martin, qui, tout en cherchant son futur dans le cinéma à Paris, se cherche aussi amoureusement, et essaye de trouver son intimité. La question de l’homosexualité n’est pas très présente dans le film, et même plutôt sous-jacente, mais elle fait ressortir ce coté très naturel, très brut, du cinéma de Michael Dacheux. L’AMOUR DEBOUT, c’est une envie de faire, d’aimer, et de faire aimer le cinéma, c’est un cheminement discret pour se trouver soi-même, c’est une bulle d’air frais dans le Paris d’aujourd’hui.


Myriem Bayad


https://www.leblogducinema.com/critiques/critiques-films/lamour-debout-une-bulle-dair-frais-dans-paris-critique-874588/

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le 9 févr. 2019

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