L'Assassinat de Trotsky par Maqroll
Un film de Losey n’est jamais un produit anodin. Quand il tourne sur un sujet aussi délicat que celui de la fin de Trotsky, que Staline fit exécuter au Mexique, on l’attend au tournant et surtout on se demande ce qui a pu retenir son attention dans cet épisode de l’histoire et comment il va y transposer ses thèmes favoris. C’est peu à peu que l’on est renseigné ici, en étudiant la lente fascination que le futur assassiné va peu à peu exercer sur son futur assassin, en apprenant aussi comment cet assassin a été placé auparavant sous une influence encore plus forte à laquelle il ne pourra pas résister… Le thème de la domination, un des chevaux de bataille de Losey… Alain Delon est une fois de plus admirable de sobriété et de talent, comme à chaque fois qu’il est dirigé par un grand du cinéma. Quant à Richard Burton, c’est peu dire qu’il se coule dans la peau de son personnage avec une conviction parfaite. La scène de la corrida, dans sa cruauté magnifique - n’en déplaise au chœur des vierges effarouchées - est bien sûr au centre du propos (et du film de par sa position même), faisant irrésistiblement songer au Hemingway de Le soleil se lève aussi, et apportant du coup un éclairage brutal au niveau de la virilité en péril du meurtrier… Une incontestable réussite à laquelle il manque juste un peu de souffle et d’ampleur pour égaler les plus grandes réussites de Losey.