La surprise vient certainement de la bonne tenue d’un long-métrage qui, de prime abord, semblait pourtant se ranger auprès des productions SyFy toutes plus indigestes les unes que les autres : l’absurdité du canevas fonctionne et suit un parcours cohérent, les personnages rendent leur caricature attachante et ont un plaisir de jeu communicatif. Surtout, on retiendra l’irrévérence qui, à l’heure du politiquement correct, fait un bien fou : cette revanche de la planète sur l’homme par l’intermédiaire de fourmis géantes résonne dans l’actualité médiatique comme un détournement des lanceurs d’alertes et autres lobbyistes soucieux de se mettre en scène pour accroître, par l’image, leur impact sur la conscience collective. Eh bien Ron Carlson procède de la même manière, mais en infléchit la logique : parce qu’il opte pour des musiciens de heavy metal plutôt médiocres et perdus dans un désert américain aux frontières abolies, il construit le revers de la médaille médiatique et s’amuse à amplifier les dérèglements (drogues, gigantisme accru, malédiction indienne, nains), à l’instar de cette scène d’exposition jouissive au cours de laquelle une jeune femme se déleste de ses vêtements déjà légers pour échapper à son agresseur. Et que dire de la parole humaine, ici dépourvue de sens et, pourtant, seule capable de mettre un terme à l’invasion – dans une clausule qui rappelle, notamment, Mars Attacks ! – ? Nous ne sommes guère loin des créations de l’absurde post-45, et cette comparaison motive l’ancrage d’une œuvre dans un contexte politique contemporain marqué par la lutte pour la défense de la planète. Si l’énergie délirante que déploie Dead Ant constitue également sa principale limite, l’œuvre ne dépassant jamais la parodie des films de monstres, il serait hypocrite de bouder un plaisir régressif mais néanmoins de qualité qui sonde la stérilité des propos écologistes quotidiennement implantés dans des productions de divertissement, au risque de les voir se banaliser, au risque de les voir disparaître.