Le titre "L'aube du monde" fait référence à l'Eden que la tradition biblique situait précisément dans cette région du sud de l'Irak, entre Tigre et Euphrate. C'est ici aussi que semblent être apparus il y a six ou sept mille ans les premiers signes de "civilisation". Ici aussi, qu'eut lieu le déluge; c'est pourquoi il est fait référence à Noé et à l'Arche. Puis pendant plusieurs millénaires, cette immense zone de marais devint lieu de refuge pour les fugitifs, les dissidents, les rebelles. Y cohabitaient jusqu'au début des années 1990 les Arabes des Marais, de tradition Chiite, et des Mandéens apparentés au gnosticisme. C’est donc sur cette puissante évocation symbolique que le cinéaste Irakien Abbas Fahdel a construit son film, donnant ainsi sens à ces paysages magnifiques ; sens renforcé par la très belle musique de Jürgen Knieper.
L’Aube du monde parle de la disparition ; ici de populations et de leurs traditions quasiment méconnues de tous, victimes « collatérales » des guerres irakiennes. Chacun, selon sa sensibilité propre, pourra donc considérer cette disparition comme négligeable, ou mesurer cette part de nous-mêmes qui s’anéantit, à jamais.
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