"L'héritage de la chair" n'est pas un film auquel Elia Kazan tenait particulièrement. C'est John Ford qui devait le mettre en scène à la demande de Zanuck. Mais Ford sentit un tournage difficile avec les acteurs choisis et se mit volontairement en maladie. Kazan débarqua en dernière minute sur le projet qu'il ne reniera jamais. Il faut dire que son sujet s'accorde parfaitement avec le fil rouge de la carrière de Kazan. On peut même y voir une prémisse d'"America America", son film le plus personnel, qu'il tournera en 1963. Kazan à travers ses origines arméniennes, se reconnait donc dans le personnage de Pinky, trop blanche pour être noire et pas assez pour être blanche.
"L'héritage de la chair" amorce quelques part le combat de la reconnaissance raciale à Hollywood. Mais nous ne sommes qu'en 1949 et le sujet est encore tabou à l'époque. Si le film passait pour osé à l'époque, la cause noire à beaucoup progressé depuis. Aujourd'hui l'aspect de revendication de ce film nous parait bien timide. A commencer par le choix de Jeanne Craine dans le rôle principale, qui a physiquement 0% de chance d'avoir eu une parenté de couleur noire. On peut aussi reprocher au film une fin très convenue et bien arrangeante pour ne pas trop froisser les spectateurs un trop conservateurs. Le film n'est donc qu'une toute petite pierre dans le chemin de la lutte contre la ségrégation aux Etats-Unis.