Deuxième film et premier western de son auteur, L'Homme des hautes plaines nous conte l'histoire d'un vagabond, tout de noir vêtu, débarquant dans la petite ville de Lago. Après qu'il ait abattu trois cow-boys, les habitants l'implorent de les sauver de l'attaque de trois bandits qui ont juré la destruction de la communauté. Il accepte, mais à des conditions qui vont bouleverser le conformisme de la bourgade.

Plus encore qu'un simple western, Eastwood fait de L'Homme des hautes plaines une fable mythologique voire biblique hautement allégorique. Incarnant une énième fois une figure mythique du cinéma, celle de l'homme sans nom des westerns de Sergio Leone, Eastwood transcende le personnage pour le hisser au rang figure surnaturelle, une sorte de vengeur revenu d'entre les morts afin de juger les hommes dans une allégorie de l'enfer et du jugement dernier que n'auraient pas renié les frères Coen. A ce titre, la ville de Lago fait office de monde des hommes à travers lequel le réalisateur propose un aperçu des multiples facettes de l'être humain. Lago, bourgade en pleine expansion prospère grâce à la corruption et surtout la violence systémique dont ses habitants savent faire preuve lorsque de bonnes âmes viennent à s'opposer à ce système déviant. A Lago, la fin justifie les moyens. Entre vengeur et messie, le personnage d'Eastwood vient rétablir une justice que l'on pourrait aisément qualifiée de divine, persécutant les mauvais et favorisant les bons, qui tiennent par ailleurs le bas de l'échelle sociale (Ex: une femme, un nain…), accomplissant de ce fait la célèbre maxime biblique : "Les premiers seront les derniers, et les derniers seront les premiers". Cette fraction d'humanité que constitue la ville nous est donc montrée comme pourrie jusqu'à la moelle, une sorte d'enfer sur Terre qui ne s'assume jamais comme tel et dont le drifter va dévoiler le véritable visage en changeant littéralement Lago en enfer. Cette dichotomie entre le charme apparent de la petite ville et l'enfer qu'elle est en réalité s'applique tout autant à ses habitants qui se révèlent être l'exact opposé de ce qu'ils croient incarner. A travers cette ville en pleine expansion c'est aussi des origines de l'Ouest américain dont parle Clint Eastwood, des origines que l'Amérique et son cinéma ont souvent fantasmé. Le cinéaste met ainsi un terme à une vision quelque peu angélique de la conquête de l'Ouest pour mettre en avant sa vision : celle d'un pays fondé sur la violence, la peur de l'autre (de l'étranger) et la corruption.

Fable allégorique sur les origines de l'Amérique et miroir tendu à une humanité qui trouvera dans ses multiples reflets les raisons de craindre et d'espérer, L'Homme des hautes plaines marque d'une pierre blanche l'histoire d'un genre que le passage d'Eastwood va profondément impacter.

Créée

le 2 mars 2023

Modifiée

le 1 mars 2023

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Antonin-L

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