Un Mel Gibson touchant dans le role d'un homme brisé

Adaptation du roman écrit par Isabelle Holland et publié en 1972, L’homme sans visage est un film dramatique réalisé et interprété par Mel Gibson pour qui ce film est sa toute première réalisation. Difficile de ne pas repenser à des œuvres telles que Le cercle des poètes disparus ou bien encore A la rencontre de Forrester, œuvres qui parlaient de la relation entre professeur et élève. Film qui m’avait marqué étant enfant et que je n’ai jamais oublié, film à la fois poétique, philosophique et psychologique. Il était grand temps de vous en parler.


Touchant mais tellement injuste


Film très rare et qui ne passe pratiquement jamais à la télévision, il s’avère être un chef d’œuvre, tout simplement. D’une part pour son casting : un Mel Gibson totalement touchant dans son rôle d’homme qui a tout perdu et un jeune garçon peu encore connu du public mais déjà talentueux et prometteur : Nick Stahl. Le travail sur les dialogues, la photographie, la mise en scène, les musiques, le drame, les quelques séquences d’humour et la tendresse sont les qualités de ce film. On est prit dans l’histoire du début jusqu’à la fin. On verse quelques larmes, on se réjouit de voir tout l’amour presque paternel que porte Justin Mcleod à Chuck et on se demande comment cette histoire va finir.


La construction et l’évolution des deux personnages est l’un des points forts du film. L’histoire de la famille de Chuck est aussi très intéressante. La mère qui a eu plusieurs maris et qui se retrouve à élever seule une petite fille de 8ans, une plus grande de 17ans (le cliché de la rousse ultra peste) et donc Chuck qui a à peu prés l’âge de 13ans. Pas facile de s’occuper seule de ses enfants quand ses trois là ne s’entendent pas. Et quand vient le jour où la mère rencontre un autre homme et que ce dernier la demande en mariage, c’est l’apothéose. Rajoutons à ça le fait que Chuck suive des cours par un homme qui est traité de monstre par tout le village et subit les pires moqueries qui puissent exister et le sentiment d’injustice se perpétuera du début jusqu’à la fin. L’amitié entre ce garçon et cet homme qui avaient tous deux perdus quelque chose de très important va leur rendre le sourire qu’ils avaient tous deux perdus.


Performance inoubliable pour film inoubliable


Le film est une vraie philosophie de vie, à la fois poétique et réaliste nous montrant la dure réalité de la vie. Amateurs de Shakespeare et autres poètes, vous ne serez absolument pas déçus. Une bonne occasion de découvrir Le marchand de Venise. Dans L’homme sans visage, on apprend énormément, que ce soit du coté de la littérature que du coté de la vie.



« Un Juif n'a-t-il pas des yeux ? Un Juif n'a-t-il pas des mains, des
organes, des proportions, des sens, des affections, des passions.
N’est-il pas nourri de la même nourriture, blessé par les mêmes armes,
sujet aux mêmes maladies, guéri par les mêmes moyens, chaud et
refroidit par le même hiver et le même été qu’un Chrétien ? Si vous
nous piquez, est ce que nous ne saignons pas ? Si vous nous
chatouillez, est ce que nous ne rions pas ? Si vous nous empoisonnez,
est ce que nous ne mourrons pas ? Et si vous nous outragez, est ce
que nous ne nous vengeons-pas ? »



La différence, l’acceptation de soit et des autres personnes, les fausses accusations, les dangers des fausses rumeurs pouvant détruire une vie, rien ne sera laissé au hasard. La mise en scène est extraordinaire, l’ambiance du film fait très années 90 malgré le fait que l’intrigue se situe à la fin des années 60. Beaucoup de réflexions sur la peur, les problèmes familiaux pour une famille recomposée mais aussi sur la solitude. Énormément de films pourraient ressembler à celui-ci mais lui est unique, il possède quelque chose que tous les autres n’ont pas. Les images sont surprenantes, les décors et paysages magnifiques. Film tourné dans une petite ville du Maine. Le type même du village paisible avec ses habitants qui se connaissent tous et avec son port. Le genre de village où on aimerait y vivre pour y passer ses dernières années.


Quasi méconnaissable grâce à des prothèses (il supporte très mal les séances de maquillage), Mel Gibson interprète un personnage très différent de ces rôles habituels. Ici, il nous prouve quel talentueux acteur il est mais aussi quel talent de réalisateur il a. Un grand bravo à lui d’ailleurs. On en apprend beaucoup sur les conséquences de la défiguration de Mcleod, pourquoi tout le monde le traite de monstre, pourquoi ne se montre-t-il jamais. McLeod est comme un personnage de conte de fée, un troll. Il vit dans une grande maison aux allures de manoir situé en bord de mer. Histoire d’accentuer cette fausse image de monstre. Il n’aime pas la solitude, c’est la solitude qui semble l’aimer.


Aussi bien devant que derrière la caméra, l’acteur brille par son talent et émeut comme jamais il ne l’a fait. Pour lui son rôle d’acteur n’était que secondaire, mais son rôle de réalisateur, rôle qui était avant tout un rôle de gestion, c’était plus dur. Il le disait dans une interview, il avait peur d’échouer même s’il savait qu’il était capable.


Nick Stahl est quant à lui naturel, authentique. Je comprends pourquoi j’aimais tant ce film étant enfant : je m’identifiais à lui et à ce qu’il vivait. Un petit coté mature et rêveur pour son rôle de Chuck Norstadt. Fort malgré cette fragilité, ce sentiment de solitude, que tout le monde est contre lui. Il est en colère, il veut réussir à s’en sortir dans la vie, c’est un battant. Il n’a que de vagues souvenirs de son père biologique. Il n’arrive plus à ce rappeler de lui physiquement jusqu’à en fait des cauchemars terrifiants la nuit. Sa mère n’est pas maternelle pour un sous, ne cherchant qu’à trouver par-dessus tout le mari idéal. De plus, les multiples agressions verbales et physiques de sa sœur Gloria ne l’aide vraiment pas à avancé.


Une histoire forte avec des personnages forts


Le sujet traité est triste, complexe, lourd. Ca parle d’amitié, du vide qu’il y a en chacun de nous et que nous essayons de combler de différentes manières. Dans notre film, on accentue le fait qu’en amitié, chacun comble le vide de l’autre. Alors que McLeod cherche une autre compagnie que son chien, essaye de faire ce qu’il aimait faire à savoir enseigner. Chuck, lui, a besoin d’une figure paternelle pour le guider, l’encourager, l’aimer. Lui qui a perdu son père à l’âge de 4 ans et a eu par la suite 3 beau pères n’a jamais réussi à vraiment se construire.


Entre McLeod et Chuck, il y a une forte relation élève/mentor, une relation si forte qu’elle serait filiale. Nait une relation d’amour très saine entre l’homme et le jeune homme. Cet ancien professeur exclu de la société à cause de son visage est devenu un ermite qui n’a plus aucun contact avec les êtres humains. Il a perdu tous ses repères, ses manières. Pour que l’alchimie entre les deux personnages paraisse crédible, il fallait qu’il y est ce même lien fort hors caméra et pour ça, Mel Gibson savait mettre très à l’aise Nick Stahl.



« Faut pas perdre son temps à penser aux choses du passé. Elles sont
parties quelques quelles soient ».



Au final, L’homme sans visage est à voir. A voir pour sa tendresse, à voir pour son coté bouleversant et émouvant, à voir pour les messages qu'il fait passer. Film à petit budget et avec peu d’acteurs, histoire simple mais forte. Une magnifique aventure, même bien plus que ça : une leçon de vie.

Créée

le 3 mars 2014

Critique lue 1.6K fois

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Jay77

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