Paul Meyer est un cinéaste wallon dont l'oeuvre la plus connue demeure Déjà s'envole la Fleur Maigre, réalisée en 1960 et montrant la vie des immigrés italiens venus pour travailler dans les mines. La Cinematek a décidé de sortir un DVD de cette oeuvre et de quelques-uns des courts-métrages du réalisateur.
Klinkhaart ou La Briqueterie en français évoque la première journée de travail dans une briqueterie justement d'une jeune adolescente de 13 ans. Sauf que le patron exerce sur la jeune fille son droit de cuissage. Inutile de dire que pour un film des années 50, l'oeuvre a connu une véritable censure de la part de la télévision mais aussi de la presse qui s'en trouva indignée à l'époque.
Klinkhaart est un drame social où le travail des enfants est mis en exergue et où la dame est réduite à un simple objet sexuel et où finalement la pédophilie est traitée à travers un système machiste. En vingt minutes, le film est porteur de différents thèmes et fort dans son propos. On constate un fonctionnement quasiment médiéval dans cette briqueterie avec un patron en grand Seigneur, entouré de puissants et ensuite de serfs (ouvriers) qui accomplissent le travail. Le droit de cuissage lui est dû. Pas question qu'un homme ne touche la demoiselle avant lui, hormis les enfants qui la "baptisent" de cambouis sous la jupe et qui n'est qu'un prélude ce qui attend la jeune femme.
C'est un drame social, mais il y a aussi un vrai travail sur la réalisation (les images sont bien plus fortes que chez les Dardenne par exemple). J'aime beaucoup ce plan-séquence qui suit les deux femmes de dos dans un long tunnel. Un tunnel où la jeune fille ne semble pas prête de s'en sortir. Le plan final est également très éloquent, rappelant certainement un souvenir d'enfance de la jeune adolescente douloureux superposé à un plan où elle est rentrée dans le bureau du patron. Meyer évoque donc la perte de l'innocence, de l'enfance avec force.
Paul Meyer est donc un cinéaste qui mérite d'être découvert et je ne peux que remercier la Cinématek d'avoir mis en avant ce réalisateur qui parvient à éviter avec talent le pathos ou la propagande sociale. Découverte de la suite pour bientôt.