L’idée qui semble être le fil directeur du film n’est pas inintéressante : comment le passé enfoui et caché de Nina, sa grand-mère juive polonaise émigrée pèse sur les frêles épaules de son petit-fils Valentin, un peintre parisien, pas très heureux et en manque d’inspiration. Pour illustrer l’absence au monde et le détachement du réel, le réalisateur fait le choix et le pari de décors peints. Si la qualité et la beauté formelle de ceux-ci ne sont pas à mettre en cause, c’est davantage dans le sentiment qu’ils font naitre de quelque chose de figé, de daté, pour ne pas dire de mort, qu’ils posent problème. Au même titre que le jeu théâtral des deux comédiens : la revenante Alexandra Stewart en lieu et place de Jeanne Moreau, qui récite plus qu’elle n’incarne et, hélas, le très fade Andy Gillet qu’on imaginerait plutôt chez Rohmer. Les trois quarts du film qui alternent les conversations entre Nina et Valentin et les états d’âme de ce dernier ennuient passablement jusqu’à l’aboutissement attendu de l’ensemble : la confession de Nina à propos de sa déportation dans les camps. Mais là encore le dispositif frontal, l’actrice sur fond noir face à la caméra, imprime une solennité presque artificielle qui sonne un peu faux.

La ressource mémorielle s’épuise décidément dans les tentatives récentes : en novembre dernier, A la vie de Jean-Jacques Zilbermann avait déçu. Aujourd’hui, on est à la limite d’être affligés par un film dévitalisé, tellement replié sur ses deux protagonistes que l’absence de tout autre personnage réel et du moindre contexte en devient très gênante. D’autant plus qu’à l’issue des révélations de Nina, lorsque Valentin sort dans la rue, les décors sont toujours peints. Comme si tout cela n’avait pas servi à grand-chose. Un terrible malaise assaille soudain le spectateur, épuisé par un dispositif trop voyant et au final inapte à faire naitre une authentique émotion.
PatrickBraganti
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le 2 mars 2015

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