Correspondances baudelairiennes
Film ô combien singulier et ô combien exigeant ! Il est dur de parler d'un tel film, un film que l'on pourrait véritablement qualifier de ‹‹film à expérience››. Je l'ai trouvé inégal, mais...
le 7 janv. 2020
3 j'aime
Cinquante ans avant Le Peuple Migrateur et La Marche de l'Empereur, La Grande Aventure était un documentaire animalier aux orientations originales. Ce premier long-métrage d'Arne Sucksdorff (écopant du Prix International à Cannes en 1954) croise la vie quotidienne d'humains et d'animaux dans un même récit, entre romanesque et reportage. Les animaux sont filmés de près, la bande-son rapporte précisément leurs bruits et leurs cris. Ils sont suivis dans la forêt, dans les chasses, lors d'expéditions contre les biens des humains (la capture des poules à la ferme) ou d'autres concurrents.
Les principaux acteurs sont des renardeaux et une loutre (Otty). Beaucoup d'autres animaux tiennent un petit rôle dans leurs traversées : oiseaux, canetons, écureuils, etc. Le principal antagoniste est un lynx. Les humains reprennent la main dans la seconde moitié : après une course à la loutre, le film part du point de vue et des initiatives des enfants ou des adultes. Contrairement au Renard et l'enfant un demi-siècle plus tard (film français ciblant la jeunesse, avec des renards dressés), il montre une cohabitation possible entre un animal sauvage et des humains, mais restant contraignante pour les deux partis et défaite en dernière instance. Les commentaires sont réduits à l'essentiel, livrés surtout au début et la mystification pas autorisée. Beauté, entraide et cruauté dominent spontanément la réalité, à hauteur d'instincts. Naturel ou artificiel, le dressage est toujours au programme de la vie. Ces images apportent une joie saine et douce, sans nourrir d'illusions et en continuant de plaider pour le rôle des Hommes.
L'authenticité et la dévotion de cette approche, la qualité de la direction et de la technique, font la force du film. L'intervention auprès des êtres est discrète, les mœurs animales ne sont pas trahies. Nous ne sommes pas dans le dessin animé prêtant une humanité aux animaux, ou simplement leur donnant la parole (comme le fera Martin Rosen, en leur laissant leurs préoccupations, dans La Folle escapade et Plague Dogs). Cette séance a également valeur de premier bilan dans l’œuvre d'un explorateur, traçant une philosophie, synthétisant des acquis et une expertise (sur le mode de vie des bêtes comme sur les tournures visuelles). Arne Sucksdorff était alors auteur de nombreux courts-métrages mettant en valeur la faune et les paysages de Suède. Ses principales réalisations à venir seront le documentaire El Djungelsaga/L'arc et la flûte (1957) et la fiction Le garçon dans l'arbre (1961). Des intérêts humanitaires s'ajouteront à sa fibre écologiste ; il finit sa carrière en activiste lié à l'UNESCO.
https://zogarok.wordpress.com/2017/01/23/la-grande-aventure-det-stora-aventyret-1954/
Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Les meilleurs documentaires, Le Classement Intégral de Zogarok, Les meilleurs films des années 1950, Les meilleurs films scandinaves et Les meilleurs documentaires animaliers
Créée
le 21 janv. 2017
Critique lue 597 fois
6 j'aime
D'autres avis sur La Grande Aventure
Film ô combien singulier et ô combien exigeant ! Il est dur de parler d'un tel film, un film que l'on pourrait véritablement qualifier de ‹‹film à expérience››. Je l'ai trouvé inégal, mais...
le 7 janv. 2020
3 j'aime
Sous ses airs de documentaire animalier des années 50, La Grande aventure devient rapidement quelque chose de plus important que ça. Plutôt contemplatif dans sa première partie et plus scénarisé dans...
Par
le 5 août 2021
Une chouette curiosité que cette Grande aventure réalisée par Arne Sucksdorff. Le metteur en scène suédois a passé des mois et des mois en forêt pour obtenir une masse de matériel documentaire...
Par
le 23 déc. 2022
Du même critique
En 1995, Mathieu Kassovitz a ving-six ans, non pas seize. C'est pourtant à ce moment qu'il réalise La Haine. Il y montre la vie des banlieues, par le prisme de trois amis (un juif, un noir, un...
Par
le 13 nov. 2013
51 j'aime
20
C’est la métamorphose d’un nain intrépide, héros à contre-courant demandant au méchant de l’histoire pourquoi il s’obstine à camper cette position. Né par sa propre volonté et détenant déjà l’usage...
Par
le 11 févr. 2015
48 j'aime
4
L‘une des meilleures comédies françaises de tous les temps. Pas la plus légère, mais efficace et imaginative. Les Visiteurs a rassemblé près de 14 millions de spectateurs en salles en 1993,...
Par
le 8 déc. 2014
31 j'aime
2