La scène inaugurale laisse entrevoir ce que va être le reste du film : une débauche de moyens, un rythme effréné et un hommage en creux à la comédie musicale, un peu américaine et beaucoup française – une dualité qui s'origine sans doute dans la double nationalité de Damien Chazelle. Auquel on aimerait conseiller de calmer le jeu, de ne pas toujours vouloir en faire trop d'un côté : les mouvements de caméra brusques et donc fatigants, la confusion entre vitesse et précipitation et pas assez de l'autre : la minceur du scénario, l'absence d'un arrière-plan social.
Car, hormis quelques belles séquences : le duo sur les hauteurs de Los Angeles, l'arrivée dans la salle de cinéma et le dernier quart d'heure qui, tout en décuplant les défauts originels, se révèle incontestablement un grand moment d'émotion, le film lasse et ennuie en n'offrant guère de développements ou de rebondissements à une histoire somme toute prévisible. On s'étonne que la ressource cinématographique de la ville ne soit pas autrement exploitée que dans la succession des auditions de l'héroïne, tout comme l'amour du jazz par le héros s'égare en poncifs. On ne s'étendra pas non plus sur la piètre qualité de la bande originale, et encore moins sur celle des performances vocales des deux acteurs. L'ensemble qui n'est certes pas honteux n'atteint néanmoins jamais la grâce et l'humour de la référence de l'auteur : Jacques Demy.
Cette réactualisation un brin vulgaire et ostentatoire jusqu'à saturation de l' œuvre du cinéaste nantais apparaît presque ringarde et surtout sans audaces. Les français Ducastel et Martineau ainsi que Honoré ont mieux su comprendre l'esprit novateur du réalisateur des Demoiselles de Rochefort et ainsi le revisiter. Ce que ne parvient jamais à faire Damien Chazelle dans un film plus épuisant que revigorant, plus énervant qu'émouvant.