On peut formuler bien des critiques à l'égard de La La Land : passons d'abord sur son titre. (..pour une fois, je préfère même le titre québécois...). Paraît-il, son racisme et son sexisme inconscients qui a suscité des propos dont, hypnotisé, je n'ai pas vraiment pu analyser le bien-fondé. Un scénario un peu entendu. Des personnages pas forcément creusés comme il faut pour qu'ils soient toujours touchants sans chansons.
Mais ! Au diable le tapage médiatique, ceci n'est pas une arnaque ou une imposture, ceci n'est pas un film raté et, s'il a bien des scories, il n'est à pas manquer car Damien Chazelle et son équipe font là montre d'une maestria de la mise en scène, certes très référencée (mais comment s'en passer ?) et héritière d'une puissante histoire de la comédie musicale américaine où les actrices et acteurs savaient autrement chanter et danser. Mais, quitte à emprunter les faiblesses (et les talents naïfs) d'Emma Stone et Ryan Gosling, La La Land réinvestit un genre en même temps qu'il l'honore. Il ne suffirait pas d'une tentative (peut-être ne peut-on pas comparer ce film aux autres puisque les musicals se comptent aujourd'hui sur les doigts d'une main, ayant délaissé les écrans pour les scènes) ; de même, on pouvait reprocher à The Artist de jouer sur une corde sensible de l'histoire qui fonctionnait d'autant plus que l'essai (enfin...la reprise) formel(le) était quasi-unique à ce moment. Mais, si tout n'est pas d'un habileté parfaite dans La La Land, Damien Chazelle a au moins eu le mérite de faire réémerger cet univers un peu oublié tout en y tirant un monde fantastique (en tous les sens du terme), sublimé par les compositions d'un Justin Hurwitz de haut-vol.
Donc oui, personnellement, je trouve ça magnifique, émouvant et jouissif. Même si Télérama et France Inter emploient probablement à peu près les mêmes superlatifs.
Du reste je vous dirige vers ce beau de texte de Joris Lacquittant pour Fais pas genre !