Mercenaires du renseignement
En plein triomphe de la série des James Bond, ce film est d'abord la critique d'un genre. Non, le monde de l'espionnage n'est pas ce que montrent ces sages films d'actions. Pas de gadgets, pas de femmes quasiment dénudées. Et surtout, pas de manichéisme.
Car c'est le point principal sur lequel insiste Huston dans ce grand film : dans le cadre de l'espionnage, les méthodes américaines ne sont pas meilleures que celles de l'URSS.
Alors, l'espionnage version Huston, c'est quoi ? C'est ruiner la vie des gens autour de soi, c'est vivre dans le mensonge et la paranoïa, c'est savoir manipuler les bonnes personnes et c'est surtout passer maître dans l'art de faire chanter tout le monde.
Le film est conçu comme une partie d'échecs où le personnage principal (nouveau venu dans le monde du renseignement) est complètement perdu parce qu'il ne sait pas prévoir plusieurs coups d'avance. Et parce qu'il n'a pas appris que ses "alliés" sont au moins aussi dangereux que ses "ennemis". Voire même plus...
Parce que l'espionnage n'est pas confié à des patriotes qui feraient tout pour l'amour de leur pays. Les agents secrets de Huston sont des mercenaires égocentriques et cruels qui sont toujours prêts à retourner leur veste si on leur fait une meilleure offre. Ils agissent par goût du pouvoir que donne cette manipulation des hommes et des femmes. Parce que ça leur permet d'assouvir leur désir de faire souffrir les autres.
Une fois de plus, avec une mise en scène apparemment simple, le grand cinéaste se met en marge des genres habituels et fait preuve d'une grande lucidité.