Londres, 1900, un inventeur, Georges a convié à dîner ses amis, une semaine après une autre soirée où il leur a parlé de l’existence de la 4ème dimension – le temps- et de la possibilité du voyage dans le temps.
A l’appui de sa démonstration, il avait fait disparaître une petite maquette d’une étonnante machine, devant ses amis très sceptiques.
Après avoir longuement attendu leur hôte en cette 2ème soirée, ils ont la surprise de le voir apparaître hagard, blessé et les habits déchirés.
Georges se met alors à raconter son extraordinaire expérience de voyage dans le temps.
Le célèbre roman d’H. G. Wells se prête magnifiquement à une adaptation cinéma grâce à l’originalité de l’histoire, à l’intérêt des aventures vécues par son héros et à la surprenante civilisation post-apocalyptique qu’il présente. Il est à noter que l’auteur a écrit au moins cinq versions de l’histoire, de 1888 à 1924, permettant diverses variations autour de ce thème. Il semble que la version 1895 soit celle qui comporte tous les éléments de l’histoire adaptée ici.
Le sympathique Rod Taylor interprète Georges; entraînant aussitôt l’empathie du public, il ne quittera pas l’écran durant toute l’histoire, faisant partager au spectateur son enthousiasme, son étonnement, sa curiosité et ses frayeurs. Le côté romantique et la touche féminine sont assurés par Yvette Minnieux, charmante représentante du peuple des élois, une partie de nos très lointains descendants.
Le personnage possède l’humanité et les sentiments dont ses compatriotes semblent dépourvus.
Mais le film (comme le roman) marque surtout par l’invention de la civilisation des morlocks, que l’on attendra avec impatience de voir surgir.
Créatures aux perruques blondes, à la peau bleutée et aux yeux phosphorescents, leur apparition déclenchera plus le rire que la frayeur bien que ces personnages aient sans doute « traumatisé » certains d’entre nous dans leur enfance.
On regrettera leur intervention assez tardive et rapide, même si le suspense entretenu sur leur présence inquiétante, les signes de leur passage et l’obsédante sirène qui annonce l’ouverture de la grande porte de leur domaine, est bien mené et très prenant.
Les morloks constituent une part de la descendance humaine qui, suite à une guerre nucléaire, s'est réfugiée sous Terre et a muté sous la forme d'une sorte de primate d'une intelligence supérieure, tandis qu'une autre partie de la petite population survivante demeurait à la surface mais perdait peu à peu toute trace d'intelligence humaine, devenant un peuple amorphe, privé de sentiments, assisté et soumis aux morloks.
Dans une assez longue séquence de la première partie du film, notre héros dans sa machine, assiste au spectacle du déroulement des jours, du cycle des saisons puis du passage des siècles le conduisant, effaré, de guerre en guerre jusqu’au cataclysme final.
Faite au moyens de trucages forts simples, la séquence reste cependant en mémoire, notamment grâce au détail du mannequin changeant de robe saison après saison et année après année, même s’il semble difficile de concevoir que Georges, vue la vitesse de sa machine, puisse réellement voir la vendeuse de la boutique en action.
On pardonnera ainsi les invraisemblances de l’histoire comme le fait que les morlocks, peuple vivant de façon très primitive ait donné aux élois une véritable cité et tout un confort de vie, alors qu’ils sont destinés à être dévorés.
Etonnant aussi que les élois continuent à parler un anglais parfait et aient une façon humaine d’agir, alors qu’ils ont perdu tout intelligence, tandis que les morlocks qui les dominent vivent et agissent comme des hommes préhistoriques et ne parlent plus que par grognements.
Simon Wells, arrière-petit fils d’H. G. réalisera en 2002 une nouvelle et fort honnête adaptation de La machine à explorer le temps, avec Guy Pearce et Jeremy Irons. Cette version, sans posséder le charme du 1er film - elle se veut plus réaliste et percutante, avec des morlocks véritablement effrayants et quelques libertés prises avec l’histoire - se suit néanmoins avec intérêt.
Le film de Georges Pal a le charme des adaptations des romans des classiques de la science-fiction, comme les romans de Jules Verne, tel Voyage au centre de la terre d’Henri Levin (1959), autre bijou de ces années 50-60, aux trucages simples mais aux images évocatrices, aux couleurs chatoyantes et aux rebondissements multiples. On pourra évoquer aussi Vingt mille lieues sous les mers de Richard Fleischer (1954) ou encore Les premiers hommes dans la lune de Nathan Juran ( en 1964, d’après un roman de H. G. Wells).
Un joli classique à découvrir sans hésiter.