Dans le Sud du Pacifique de la fin des années 30 et du début des années 40, alors que les États-Unis ne sont pas encore entrés en guerre contre l'Axe, la meneuse de revue Bijou Blanche voyage d'iles en îles, de boites de nuits en boites de nuits et de cabarets en cabarets au grès de ses expulsions pour tapages nocturnes, rixes et troubles à l'ordre public. Avec ses éternels compagnons, un déserteur de la marine et un magicien pickpocket, elle monte partout où elle passe son célèbre spectacle "The man's in the Navy" qui fait tant trembler les autorités locales et les barmen mais fait tellement fureur auprès des officiers et sous-officiers de la marine des États-Unis. L'un d'eux notamment, le Lt. Dan Brent, s'amourache de la furie blonde et entreprend, au péril de sa carrière dans la Navy, de l'épouser. Mais tant pour la Navy, qui veut garder son précieux officier à quelques mois de l'attaque de Pearl Harbour, que pour le business du divertissement, qui voit d'un mauvaise œil la soudaine respectabilité et pudeur de leur poule aux œufs d'or, le mariage des deux tourtereaux embête...
Seven Sinners est la première des trois collaborations du Duke et de l'Angle Bleu. Leur complicité est une évidence et saute aux yeux. Même à ceux des femmes de Wayne puisque, d'après plusieurs sources, leur amitié ambiguë et longue durée serait à l'origine de pas moins de deux divorces de l'acteur (il a divorcé trois fois et ses marié trois). Quoiqu'il en soit leur premier film ensemble est une réussite. Tay Garnett, qui est un vieux routier du muet, insuffle une énergie folle et communicative à son film. Il signe même une bagarre d'anthologie (la plus grande de l'histoire du cinéma très probablement) qu'il monte si bien qu'on la croirait réelle (la boite de nuit qui sert de ring n'en réchappera pas indemne). Le numéro de travestissement de Dietrich est également resté dans la légende : accoutrée comme un marin, elle chante "The Man's in the Navy" et lance ses regards magnétiques à l'assistance. Mythique.
Josef von Sternberg du apprécier à l'époque. C'est sans doute pour ça que, au-delà de ces qualités indéniables, le film ne m'a pas emballé outre mesure. Il y a quelques choses dans l’atmosphère des îles du Sud de l'Asie qui me dérange au plus profond de moi-même. L'étroitesse des rues, des couloirs et des chambres d'hôtels, la surpopulation où que l'on aille, la chaleur moite et suffocante des tropiques... C'est à peu de choses près mon idée même de l'enfer. Cinématographiquement c'est à double tranchant du coup. Ou j'adore l'ambiance enfiévré et oppressante de Shanhai dans Shanghai Express et surtout The Shanghai Gesture, ou je déteste la moiteur de Macao et d'Anatahan dans les films homonymes (et toujours de von Sternberg). Reste toujours la magnifique Marlène Dietrich qui fit de la citation de Joséphine Baker (« Puisque en scène, je fais sauvage, je m'applique à la ville à devenir civilisée... »), son leitmotiv.