La Mort en prime
6.5
La Mort en prime

Film de Alex Cox (1984)

Qu’il est revigorant de se confronter à une bobine aussi déjantée que Repo Man. Aucune comparaison n’est possible, cet ovni venu d’ailleurs fait l’effet d’un cadavre exquis visuel en roue libre, stimulé par toute sorte de substances chimiques, et craché en mode automatique sous une impulsion cantonnée par aucune limite, qu’il est habituellement de coutume de cacher, un peu honteusement, au fond d’un tiroir, à côté de son premier playboy.

Mais Alex Cox, lui, c’est un bonhomme ! Et ses fantasmes cinématographiques les plus absurdes, non seulement, il ne les planque pas, mais il les imprime fièrement sur bobine. Aidé en cela par quelques breuvages énergétiques qu’il parsème dans ses images— je ne parle pas d’Isostar hein— et une bande son Rock’n’roll qui réjouira tout tympan normalement constitué, le caïd du treizième degré accouche d’un enchaînement complètement surréaliste de séquences mêlant habilement abstraction d’un intarissable flux d’idées et imagerie in your face qui ne connait pas la subtilité.

Concept d’ailleurs complètement absent de chaque parcelle constituant cette œuvre issue d’un esprit se gaussant du ridicule. Si pour imager une potentielle présence extraterrestre, il faut sortir les gros néons roses, et balbutier ses premiers pas en matière de post production, qu’à cela ne tienne, du moment que l’image est compréhensible, le réalisateur valide. En témoigne ce final dément, lors duquel il fait voler pendant 5 minutes, au dessus d’une cité des Anges reléguée au rang de maquette, un bolide vert fluo tout droit sorti d’un paquet de céréale.

Si les esprits normalement constitués rejetteront en block la proposition sans queue ni tête du faux punk aux commandes, ceux qui sauront prendre le film pour ce qu’il est, à savoir la digestion assumée de références bis en tout genre, apprécieront ce voyage marqué par une liberté de chaque instant. Liberté de ne pas s’encombrer d’un script linéaire utile, liberté de croquer des personnages en déphasage total avec ce qu’ils sont censés représenter et liberté d’écrire des dialogues au ras du bitume, sans recul, mais avec un sens du bourgeonnement qui fait sourire.

Repo Man est à déguster les écoutilles du vingtième degré ouvertes 3 fois, la tête prête à dodeliner sur une bande son aux petits oignons et une féroce envie d’en découdre avec cette rationalité que l’on recherche pourtant habituellement au cinéma. Ce sont les défauts, que l’on relève habituellement dans tout film manqué, qui font la force singulière de cette bobine à part. En tant que dévoreur de films en tout genre, on ne peut que lui témoigner un profond respect, sans pour autant éprouver à son encontre plus qu’une honnête sympathie passagère.

Le genre de moment qui file un smile presque douloureux tant il est présent, qui sera pourtant impossible à défendre lorsque le camp de ses farouches détracteurs se manifestera par surprise dans cette ruelle sombre et poisseuse où, comme moi, un peu honteux, vous avez écrit, le regard pourtant sur le qui vive, votre modeste avis.

CLING !
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oso
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le 25 sept. 2014

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oso

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