Bien des précautions oratoires semblent nécessaires pour émettre un jugement critique sur un tel film.
L’horreur du génocide juif, de l’Occupation et des complicités de la France sont des plaies béantes dans l’Histoire nationale, ont donné lieu à de multiples témoignages. Ceux qui ont tenté d’écrire cette page de l’Histoire ont souvent fait émerger la notion d’indicible, incapables de restituer avec justesse l’effarement causé par un tel gouffre.
Rose Bosch, réalisatrice et scénariste de La Rafle, (qui a aussi écrit Bimboland, ouais, t’as vu, #lemondedoitsavoir) ne s’est visiblement pas posé les mêmes questions. Peut-être s’est-elle dit qu’il était nécessaire de trouver la formule qui puisse parler au plus grand nombre, jusqu’à flirter sans sourciller avec un C’est pas sorcier destiné aux projections scolaires. Dès le carton initial (« Tous les événements de ce film, même les plus extrêmes, ont bien eu lieu l’été 42 »), le ton est donné : appuyons, surlignons, sortons les violons.
Le film semble ainsi, n’en déplaise à son sujet, interdit aux plus de 8 ans : à hauteur d’enfant, ceux-ci occupant le devant de la scène, histoire de portraiturer avec facilité la naïveté indiscutable des victimes, avec en tête de proue un insupportable bambin zozotant des questions essentielles pour révéler son impréparation à une telle barbarie.
Autour de lui, c’est la bande des malicieux, l’amitié type Guerre des boutons, les mères éplorées, toute une galerie de portraits à la truelle, qui semblent pourtant des Doisneau lorsqu’on nous gratifie de petites séquences historiques avec Hitler qui mange un gâteau, prône le végétarianisme. Se distinguent ensuite les figures d’autorité que représentent le personnel soignant. Jean Reno, médecin juif est d’une crédibilité plus que discutable, mais se voir ravir la vedette par un Gad en mal de drame et surtout Mélanie Laurent, infirmière martyre qui se charge de prendre à bras le corps le stabilo du pathos : et que je me sous-nourris par empathie, et que je tape les gendarmes, et que je cours à bicyclette en montage alterné avec le départ du convoi final pour la Pologne, pour aboutir sur un quai ou seul subsiste le petit lapin laissé par le Nono que seul une pierre tombale ne pourrait pas trouver trognon.
Ajoutez du piano, des violons et des larmes, des comédiens s’étant entendu dans un effort collectif pour jouer tous aussi mal, et une petite récompense aux enfants du public avec le sauvetage des deux frimousses les plus attachantes, et le tour est joué.
Embrassades, applaudissements, larmes de joie, c’était chouette ce film en fait, vivement le prochain.