L'ouverture du film est tellement un mauvais choix que ça mériterait un nouveau mot dans le dictionnaire. Montrer Hitler en images d'archives, paumé dans Paris comme un vieux papy, sur fond de "Paris" au gramophone, c'est une dichotomie tellement usée que ça me l'a rendu éminemment sympathique, le vieux schnock !
On embraye sur un gag digne de Mel Brooks : un officier Allemand filme un carrousel, la joie au cœur et le sourire aux lèvres. Soudain, son objectif se pose sur le plastron d'un enfant... Qui révèle son étoile jaune ! Ah merde ! Fini le sourire...
Ensuite une longue et répétitive intro des personnages, ou chacun représente UNE façon d'agir ou de penser, et une seule. La fille geignarde qui met en garde tout le monde, le gentil papa qui fait des blagues, le marmot débrouillard... Tous les membres de la famille sont tellement caractérisés qu'on a du mal à croire à des êtres humains. C'est du vilain travail de scribouillard pigiste qui veut se débarrasser d'un script embarrassant.
Et alors quand Madame Bosch filme Hitler pour de vrai, c'est festival ! Déjà j'ai pas su dire immédiatement si c'était le vrai Hitler, ou un acteur de comédie qui jouait Hitler à la radio pour faire marrer ( mais pourquoi se déguiser à la radio ? non c'est lui ! ) et ensuite, à peine après son discours, il se prend une piquouze, juste pour montrer la dépravation totale.
Les scènes Pétain-Laval sont toutes construites pareil : " Mais enfin, [insérer ici le nom de l'interlocuteur], vous devez bien savoir que [insérer ici une information d'ordre historique]... " Bah s'il connaît son propre nom et le fait historique relatif à la scène pourquoi en parler comme ça ?
C'est comme si au milieu de mon article je vous interpellais : " Mais enfin, cher lecteur, vous vous rendez compte que j'écris un papier sur La Rafle ! "
Ajoutez à cela une utilisation complètement téléfilmique du scope et vous obtiendrez une des plus mauvaises fresques historique de la galaxie.
Tout ceci serait sans suite, si évidemment Roselyne Bosch n'avait pas laissé libre cours à sa fantaisie dans le magazine Les Années Laser...
« Je me méfie de toute personne qui ne pleure pas en voyant le film. Il lui manque un gène : celui de la compassion » entame t'elle avant de lâcher son célèbre : « On pleure pendant La Rafle parce que... on ne peut que pleurer. Sauf si on est un "enfant gâté" de l'époque, sauf si on se délecte du cynisme au cinéma, sauf si on considère que les émotions humaines sont une abomination ou une faiblesse. C'est du reste ce que pensait Hitler : que les émotions sont de la sensiblerie. Il est intéressant de voir que ces pisse-froid rejoignent Hitler en esprit, non ? »
Or, si quelqu'un vient à peine de rejoindre Hitler, c'est vous Madame Bosch. Il y a selon vous des gens dont il convient de se méfier car il leur manque un hypothétique gène... Et ça me gène.
Car si on reconsidère le film tel qu'il est fabriqué, on a droit à :
1 / Hitler est un gentil papy paumé sur la place de l'étoile (sic!)
2 / Les Juifs sont tellement mal écrits qu'on ne croit pas à des êtres humains
3 / Tout ça, hop ! On les dégage !
Ah bah tant mieux, finalement ! C'est une véritable succes-story ce film en vrai !
A la lumière de ces éléments, je retire tout ce que j'ai dit de mal sur le film. Du point de vue Nazi, c'est une franche réussite...
Au lieu de se méfier de ceux qui ne pleurent pas à la fin, Roselyne Bosch aurait mieux fait de prendre en compte ceux qui rient dès le début.