Avec La Vengeance d’une blonde, le petit cinéma de Jeannot Szwarc s’ouvre à la comédie populaire française et s’inscrit dans une veine portée par la troupe du Splendid et surtout mise en scène par le réalisateur Jean-Marie Poiré, auquel il emprunte d’ailleurs ses tics de metteur en scène, à savoir un montage nerveux qui relie entre elles des séquences construites sur une montée en puissance burlesque – une action prend de l’ampleur, gonfle jusqu’à l’explosion, puis coupe –, une intrigue qui investit un milieu historique ou socioprofessionnelle par le biais d’un duo de personnages (le couple Bréha), un humour volontiers trivial voire franchement grossier qui se repaît des caricatures qu’il représente, un générique conclusif qui concentre les plans les plus iconiques du film en les attribuant aux acteurs qui les interprètent (le même procédé est utilisé par Les Visiteurs, Papy Fait de la résistance, L’Opération Corned-Beef etc.).
L’intérêt du long métrage, c’est qu’il s’arme de la comédie populaire pour pénétrer un milieu qui fascine les masses mais dont les coulisses restent méconnues, le milieu du journalisme télévisé. Ce dernier est d’emblée dépeint sous les traits d’une usine à scandales qui ne s’intéresse qu’à la réussite de la chaîne, garantie des réussites individuelles : peu importe la qualité de l’information, peu importe sa pertinence ; seul vaut l’audimat, traduction chiffrée de ce peuple moutonnier qui « ne veut pas comprendre, mais seulement savoir ». La télévision est une industrie qui exploite les situations et transforme les hommes, à l’instar de ce présentateur de divertissement grotesque incarné par un Thierry Lhermitte tout refait de partout, de la moumoute aux chicots. Et le film met en scène la descente aux enfers d’un couple – et plus largement d’une famille – dont le mari passe derrière l’écran pour devenir une image, une image médiatique qu’il faut sans cesse nourrir, une image présente dans les millions de foyers français, un corps absent auprès des siens. Il est intéressant de mettre en regard l’image du journaliste et les toiles sulfureuses qu’expose chez elle mamie Jany : toutes deux sont des supports sur lesquels le spectateur peut projeter ses propres fantasmes, des écrans qui immortalisent et tuent l’être de chair. Le farcesque sert donc une critique jouissive, bien que superficielle, des médias : comme le dit si bien Corine à son mari, « continue la télé, mais arrête ton cinéma » !
Toujours sympathique mais jamais hilarant, La Vengeance d’une blonde bénéficie d’un casting monté sur ressorts, de Marie-Anne Chazel en épouse rebelle à Christian Clavier en jeune présentateur régional qui débarque à Paris comme un parvenu aux rêves de gloire. Une comédie divertissante et alerte, qui souffre néanmoins d’une forme trop impersonnelle et trop sage pour conférer à l’ensemble une identité véritable (à la différence, entre autres, du cinéma de Jean-Marie Poiré).