Avant propos.
Ce qui suit est un bazar sans nom tant j’ai du mal à parler du film. Je l’aime autant qu’il m’ennuie. Il me fait soupirer autant qu’il me touche... Grumph !


La vie est belle, c’est la bobine à avoir dans son top100, le petit conte à la ricaine intelligent qui file le sourire, qui rappelle que la vie, c’est aussi les bons sentiments. Si l’on conçoit le film de Capra comme un conte de noël, la recette est fameuse, sa morale finale, quoique d’une utopie à toute épreuve, fait fondre le cœur en guimauve de quiconque connaît les joies de l’amitié ou de l’amour familial. Bref, tout est réuni pour un petit moment de félicité sans adversité parfait pour recharger ses batteries après une semaine de dur labeur.


Malgré tout, pour ma part, sans pour autant remettre en question la belle réputation du film —méritée, tant son message universel et positif ne saurait être remis en question — j’ai souffert par moment d’un ennui assez considérable devant cette tranche de bonheur sans aspérité.


Si sa dernière partie m’a filé le sourire, elle est arrivée un brin trop tard pour me sortir de ma turpitude. George qui cherche sa promise dans les pétunias, George qui accorde des crédits comme on file 1€ à son petit frère pour qu’il s’achète 3 malabars, George qui rembourse tous ses clients avec l’argent de son voyage de noce, George qui n’est pas foutu de mettre trois grammes de colle à bois sous le pommeau de l’escalier qui lui reste toujours dans la main, George qui est prêt à passer du père modèle au fouettard qui pèterait les chicos de ses marmots pour 8000 dollars, George partout, trop de George à mon goût.
Un travail de répétition dont je me suis lassé assez vite parce que sa prévisible mécanique a été annoncée dans les premières secondes. Un ange doit intervenir, et bien qu’il intervienne, la biographie du brave George ne fait que trop s’éterniser.


Vient alors une dernière partie salvatrice qui contextualise enfin le portrait simpliste d’une Amérique à deux vitesses dont il est question, par une petite pointe de fantastique qui assoit complètement l’orientation conte de l’histoire. On devine alors aisément que tout le film découle de cette idée précise et que l’écriture de la première partie n’existe que pour y conduire. Dès lors se pose la question de l’équilibre entre les deux parties : pourquoi la concrétisation de la fable sociale qui s’étire sur les trois quarts de sa durée met si longtemps à prendre place et pourquoi est-elle si vite sabrée alors qu’elle pourrait potentiellement être à l’origine d’un seul et même film.


A mon sens, La vie est belle souffre d’un dosage pas forcément pertinent entre sa phase « je pose les questions en usant d’un idéalisme à toute épreuve » et « j’y réponds enfin par la force d’une belle idée et une illustration grise de la vérité ». On saura me répondre qu’il est évident que pour que la démonstration fonctionne, il faut avoir développé le personnage de George avec précision. Je suppose alors que c’est davantage une histoire de ressenti que de réelle objectivité, mais j’eus préféré me passer d’une cour longuette non nécessaire en 25 temps de la belle Mary (même si le lâcher prise de Steward au téléphone, superbe, n’en a que plus d’impact, j’en conviens) au profit d’un temps d’antenne plus conséquent de ce bon Clarence.


Gasp, plus je torture mon clavier à propos de cette vie est belle et plus je me dis qu’il est vain pour moi d’essayer d’en parler. Vain parce que je suis tout sauf son public cible, vain parce que je ne peux décemment pas lui reprocher sa guimauve complètement logique. La vie est belle, c’est un film à voir en famille, une bobine à faire découvrir à ses rejetons en fin d’un week-end pluvieux ou en pleine veille de noël. Une bobine utile et nécessaire parce qu’elle est naïvement touchante, finalement.


Un petit aparté alors pour finir et promis je vous quitte. Je suis tombé sur une version colorisée du film que j’ai immédiatement arrêtée. Comment peut-on, sous couvert d’avoir la technologie à disposition, décemment altérer à ce point la beauté visuelle du film, à savoir la puissance des contrastes de ses noir et blanc. Comment peut-on lui substituer des couleurs pastelles inexpressives sans avoir l’impression d’assassiner ce qui fait sa puissance visuelle, la question reste posée...

oso
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le 21 mai 2016

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oso

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