Support: Bluray
La sortie de Hundreds of Beavers en 2022, assez confidentielle car limitée aux festivals déviants jusqu’à arriver à Gérardmer en 2024, aura mis en lumière l’existence d’une équipe de pieds nickelés qui a réussi à se faire une toute petite place dans l’univers de la comédie en croisant les influences pour proposer un truc abracadabrantesquement singulier. Suffisamment pour me faire commander le bluray sur lequel se trouve en bonus le film qui nous intéresse aujourd’hui, premier coup d’essai de cette bande de joyeux lurons.
Un objet loufoque, fait de brics et de brocs, fauché et inventif. Une œuvre qui puise effectivement dans une palanquée de références pour les hybrider dans un joyeux bordel. On y retrouve pele-mêle l’esthétique faux-toc de Wes Anderson, l’absurdité raisonnée des Monty Pythons, le dynamisme des shōnens, la patine des vieux films de monstre type Creature from the Black Lagoon, le douloureux burlesque des Looney Tunes, l’irrévérence bienveillante des Simpsons, et la débilité jusqu'au boutiste assumée de Bob l'Éponge. Un melting pot sous speed, débordant d'énergie, mais peinant parfois à caler son rythme sur quelque chose de digeste, et à se définir une identité détachée de ses influences.
La première demi-heure a en effet de quoi inquiéter. Écartez les épileptiques et les nauséeux, la défiance perpétuelle de la bienséance narrative et cinématographique donne un joyeux gloubi boulga, pour le meilleur et pour le pire, débitant textes et gags burlesques à toute allure sans jamais prendre pause. Mais si vous passez ce cap de trente minutes, la folie, si elle ne s’adoucit pas, semble mieux maîtrisée, variant les décors et situations, et renouvelant l’intérêt.
Le scénario entier semble construit sur le simple questionnement : “Peut-on faire ça à l’écran? Oui? Alors on le met!”. Quant à la forme, on abuse sans vergogne de la désynchronisation labiale, du grain du film, du flou des contours, du dédoublement de l’image, des plans débullés. Faire un film qui transpire volontairement les trucs et astuces de petit malin pour pallier le manque de moyens trouve ses limites dans la répétition de certains effets visuels et humoristiques, mais permet parallèlement à l’équipe de Ryland Brickson Cole Tew et Mike Chiklis de se faire remarquer, et de pouvoir mettre à l’oeuvre leur ingéniosité pour sortir leur péloche.
Lake Michigan Monster est un galop d’essai aussi drôle qu’il peut être éreintant, et reste une expérience suffisamment courte pour que je puisse la conseiller aux curieux. Et si ce n’était pas son rôle initial, il m’a fait l’effet de l’apéro avant la bouteille de pinard Hundreds of Beavers que je m’enfilerais sous peu.