Polyphonique...
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le 28 oct. 2014
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2ème film d’un réalisateur australien aussi peu prolixe qu’il est à suivre (3 films depuis 1985), Lantana prend un malin plaisir à semer le trouble sur sa codification générique.
Le préambule, qui nous présente un cadavre dans un bosquet, annonce une couleur noire et les développements d’un policier, d’autant plus que c’est la profession du protagoniste. Mais rapidement se déploie un récit choral qui va longuement différer ce motif initial et dériver vers une sorte de relecture des Scènes de la vie conjugale. La question du couple se décline sur différents personnages qui vont être mis chacun à l’épreuve : par l’infidélité, la suspicion, le deuil, les sous-entendus.
L’intérêt résulte de ce paradoxal mélange entre la dynamique formelle de l’écriture (un récit choral, c’est-à-dire un puzzle qui progressivement va s’assembler pour faire sens) et le fond abordé, à savoir l’incommunicabilité entre les êtres. Plusieurs motifs soulignent avec une ironie mélancolique les voies de traverses nécessaires pour accéder à l’autre : un livre pour l’une, des confessions chez le psy enregistrées sur cassettes et écoutées par le mari pour une autre. À chaque fois, les hypothèses d’un des partenaires dans la complaisance ou l’angoisse de ses pensées solitaires, formulent des malentendus ou des erreurs.
Anthony Lapaglia, au pivot de tous ces récits, fait mouche par cette alliance improbable de massivité et de fragilité : fragile du cœur – dans les deux sens du terme, il est la figure d’un homme qui ne sait plus quelle direction donner à ses tourments : la violence, la grossièreté, la libido, le mutisme ou les larmes. Sa maladresse et son malaise lors de la scène de danse où il retrouve sa maîtresse et sa femme condensent, en une scène anecdotique, cette paralysie corporelle et psychologique à laquelle se résume sa vie.
Rien de tel qu’un terreau aussi fertile pour constituer une enquête, qui ne commencera qu’au bout d’une heure et, il faut le reconnaître, ne tiendra pas toutes ses promesses. Parce qu’on l’a trop fait attendre, et parce que, surtout, son aspect déceptif clame haut et fort que l’essentiel est ailleurs : la vérité décevante est peut-être ce qui a été à l’origine de tous les maux des personnages. Un seul couple fait figure de modèle, par une foi aveugle, et c’est précisément celui qui focalise la suspicion ; les autres se fourvoient, par le silence ou la pudeur, le mensonge ou un décodage erroné des informations qu’on leur dissémine.
Le passage forcé par une résolution n’appauvrit donc pas vraiment la profondeur des personnages qui ont porté le récit : Une fois les ressentis formulés et les vérités affrontées, c’est dans le silence de l’émotion que se propage la mélodie douce-amère d’un film qui reste à l’esprit, et dans le cœur.
(7.5/10)
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le 22 janv. 2019
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