Psychédélique, excessif, drôle et provoquant, cynique même, farfelu, critique surtout ; dément aussi, enragé, dérangé, jouissif, hilarant, inspirant, touchant, hargneux, révoltant, autodestructif, acide, pittoresque, Las Vegas Parano scintille de toutes parts. Il laisse un petit moment de silence, un p’tit blanc, les soirées où l’amateur d’excès veut en faire profiter ses amis, plutôt portés sur le raisonnable. Les sourcils se froncent, les regards sont hagards, les narines se crispent, les lèvres se pincent, le dégoût est amer, vient à l’esprit la question de la première fois : mais qu’est que c’est que ça ?
Voyons. C’est un crachat sur la guerre du Vietnam, sur la réussite sociale qui sans idéal conduit à l’apoplexie ; ça ?! C’est un véritable refus des conventions, des coutumes et des catégories, une ode aux couleurs du désespoir américain des années 70 et surtout un immense défouloir pour qui tente le voyage. On voit des paradis artificiels en images ; et quand certains préféreront s’extasier sur des navets académiques et ennuyeux, d’autres trouveront une bouteille de rhum planquée dans leurs draps, au moment où ils s’y attendent le moins.
Las Vegas Parano ne donne pas de leçons. L’expérience est une prise de conscience, une déstructuration de l’âme pour un retour à son côté bestial, spontané et naturel. Comme un jeu, le film prend à contrepied la morale puritaine d'un quotidien rangé, qui nous gêne peut-être inconsciemment, et qu’on dit comprendre ou épouser. Mais ce serait sans compter les mimiques hallucinantes de Duke ou les cris déments de Gonzo. Qui n’a jamais rêvé de déambuler sous éther dans un casino, avec un fume-cigare et une visière transparente et verte ? Ou de voguer dans le Grand Ouest américain, le ventre à l’air et une bière à la main ? Personne évidemment. Histoire de catharsis, mélangeons pour le plaisir les frontières du réel et du drogué, mais toujours avec sensibilité et intelligence.