Intime confection
Dans Adam, Maryam Touzani filmait des femmes en peine, façonnant dans leur boulangerie de quoi nourrir le quartier de la médina. Le Bleu du caftan offre une variation à ce cadre, puisqu’il s’agit...
le 9 mai 2023
13 j'aime
En 2020, on avait découvert la cinéaste Myriam Touzani avec Adam, un premier long-métrage dans laquelle elle dressait le portrait plein de tendresse de deux femmes dont l’une était interprétée magnifiquement par Lubna Azabal. On retrouve l’actrice d’origine marocaine (par son père) dans le deuxième film de la réalisatrice marocaine, incarnant le rôle de Mina, une femme malade, mariée à Halim (Saleh Bakri), un tailleur et couturier, installé dans la médina de Salé. Pendant que lui cout et rénove méticuleusement des caftans, Mina tient la boutique. Mais l’arrivée d’un jeune et bel apprenti (Ayoub Missioui) va quelque peu bouleverser l’équilibre de ce couple.
Présenté à Cannes en 2022 dans la section « Un certain regard », Le Bleu du caftan se situe dans le même registre que le précédent film de Myriam Touzani. On y retrouve cette sensibilité, cette sensualité, cette économie de dialogues, cette manière si délicate de mettre en scène les rapports humains à travers le jeu des regards, des gestes et des attitudes des protagonistes.
Ici, il est question de montrer comment un homme peut vivre son attirance pour les hommes dans une société arabe où l’homosexualité est considérée comme un délit.
Plutôt que de faire un film purement politique, la réalisatrice préfère le ton du mélodrame pour évoquer ce thème ô combien tabou dans les pays du Maghreb et ailleurs, d’aborder cette question à travers l’histoire d’un couple où le secret est bien gardé, où la question n’est jamais abordée, mais où l’un et l’autre savent et s’en accommodent.
Avec ce nouveau film très sensoriel et presque en huis clos, Myriam Touzani montre encore une fois beaucoup de talent et de maîtrise dans son art, proposant un récit dans lequel l’amour tient une fois encore une place centrale, où la position des personnages évolue au gré des événements, et où chacun doit faire des concessions pour que la vie ait l’air normal, et que personne ne se mette en danger.
Si le film parle d’amour, de non-dits, de respect et d’homosexualité, en arrière-plan, il montre la vie au sein de la société marocaine, mais surtout, il rend hommage au travail ces artisans couturiers, au savoir-faire de ces « maalems », un terme donné aux artisans d’art au Maghreb.
Avec un soin tout particulier, nommant dans les mouvements de caméra, la réalisatrice marocaine filme la passion du métier, la beauté des tissus, la finesse des étoffes, l’art de coudre au fil doré, un travail d’art minutieux qui demande temps et patience.
Un film bouleversant, bourré d’humanité, qui plonge le spectateur durant deux heures dans un univers d’une délicatesse absolue.
Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes FILMS DE 2023 et Le Classement des FILMS de 2023
Créée
le 5 mai 2023
Critique lue 23 fois
D'autres avis sur Le Bleu du caftan
Dans Adam, Maryam Touzani filmait des femmes en peine, façonnant dans leur boulangerie de quoi nourrir le quartier de la médina. Le Bleu du caftan offre une variation à ce cadre, puisqu’il s’agit...
le 9 mai 2023
13 j'aime
[Critique à lire après avoir vu le film]Il y a ceux qui illustrent, soulignent, montrent, voire démontrent, et il y a ceux qui préfèrent suggérer, évoquer, s'en tenir au parfum de..., stimuler...
Par
le 4 avr. 2023
8 j'aime
Deux ans après le lumineux et émouvant Adam, Maryam Touzani signe son retour en nous invitant à plonger les yeux dans Le Bleu du Caftan. Au cœur de la médina de Salé, Mina et Halim partenaire à la...
Par
le 15 sept. 2022
8 j'aime
4
Du même critique
Déçu par Le Mans 66, film dans lequel je n'ai vu qu-une banale histoire de rivalité, pleine de testostérone, de vroum vroum et de "c’est qui meilleur" ? Certes les voitures sont belles, la...
Par
le 16 nov. 2019
26 j'aime
1
Difficile pour moi de comprendre la quasi unanimité critique autour du film de la réalisatrice Carole Vignal dans lequel on suit une femme partie randonner dans les Cévennes sur les traces de son...
Par
le 20 sept. 2020
24 j'aime
2
Retour à Paris pour Klapish qui propose un film (en gros) sur le thème de la solitude des grandes villes et de l’impact du numérique sur nos relations humaines. Sans doute un film intéressant pour...
Par
le 15 sept. 2019
22 j'aime