Consultation psychiatrique.
Ce film a été pour moi l'occasion d'une des expériences cinématographiques les plus étranges de ma vie. Certes, il m'était déjà arrivé de voir des films muets mais jamais un film sans aucune musique aucune. La salle était pleinement silencieuse comme si nous étions brusquement entrés dans une église, comme si nous nous apprêtions à nous recueillir devant une quelconque transcendance, devant l'extraordinaire pouvoir de la folie peut-être.
Les plans obliques défient toute géométrie euclidienne, les colorations de certains plans et leurs variations, notamment la première scène où le violet domine, n'ont rien de naturel comme si on avait cherché à abolir à tout prix l'effet de réel et ce dans tout le long-métrage. On aurai pu s'attendre à ce que la première et la dernière scène échappent à ce traitement pour souligner la différence justement entre le délire de délire de Francis et le monde réel. Mais là, tout est comme pris dans un tourniquet baroque, tout le monde est fou, même ceux qui osent croire qu'ils échappent à ce mal. Le mythe du Docteur Caligari et de son cobaye Cesare sert de mise en abîme à un traitement très particulier de la folie hérité semble t-il de l'imaginaire romantique allemand où rêve et réalité tendent à se confondre, où le sommeil est peuplé de chimères inquiétantes, où la folie est spectacle. On ne s'ennuie pas un instant dans ce film où rien ne saurait rester immobile plus d'un court moment, on est emporté dans un mouvement frénétique que nous avons parfois même du mal à comprendre.
Un film qui nous montre que Tim Burton n'a rien inventé, qu'il n'est qu'une pâle copie parmi tant d'autres de génies du cinéma oubliés mais qui ont pourtant bien plus à nous apporter.
Peut-être un des meilleurs films de l'expressionnisme allemand.