Je sais ce que vous allez dire : il faut une certaine dose de masochisme pour regarder un tel film. D'autant plus que j'ai été prévenu, à maintes reprises, depuis belle lurette maintenant : ce film, c'est du caca sur pellicule. Et, personnellement, je n'avais pas une envie irrépressible de découvrir si ces rumeurs étaient fondées : j'avais mon opinion bien à moi, basée sur un a priori complètement assumé et sur une certaine connaissance de l'oeuvre de Louis Leterrier, et je n'avais pas envie de me faire avoir une fois de plus.
Mais, vous savez ce que c'est : ambiance estivale, repas familial, qu'est-ce qu'il y a à la télé ? oh tiens ! Le Choc des Titans, ça doit être sympa.
Mais non ! ai-je failli hurler. Trop tard. Et me voilà obligé de savourer Liam Neeson, caparaçonné comme le canasson d'un chevalier dans un Moyen-Age de pacotille, en train de jouer le divin papounet.
Alors, bien entendu, ce film est nul : là, je ne vous apprendrai rien. Je m'y attendais un petit peu, même si j'avoue en avoir sous-estimé la laideur. Bien entendu, les trucages numériques sont moches, mais c'est encore pire avec la caméra parkinsonnienne façon Michael Bay. Et le sommet de la monstruosité revient sans conteste à la représentation de l'Olympe, qui ressemble à un improbable mélange entre la salle de conseil des Jedi dans L'Attaque des Clones et une Table Ronde pour une production biélorusse des aventures d'Arthur. Et Zeus étincelle comme la devanture d'un bordel des beaux quartiers parisiens.
Mais l'horreur absolue, l'aberration ultime réside dans le traitement infligé à la mythologie grecque. Pour faire simple, le scénario a entièrement christianisé les légendes achéennes. Dès le début, on apprend que Zeus a créé les hommes (ah bon ? Je croyais bêtement que c'était Prométhée). Et quand on nous dit, quelques secondes plus tard, que Hadès est le dieu des Enfers et qu'il règne sur un monde sombre et monstrueux, quand on nous le montre, seul dieu vêtu de noir, traître, violent, belliciste, etc., alors on comprend facilement la migration qui s'est opérée. Zeus est devenu YHWH et Hadès Satan. Le jeu de Ralph Fiennes confirme encore ce choix : il ressemble à un mélange entre Voldemort et le Père Fouettard.
Et cette trahison de la mythologie grecque est attestée dans tout le film. Ainsi, il y a un aspect christique dans tout le film, dans le personnage de Persée bien sûr, mais aussi dans Andromède, cette princesse prête à se sacrifier pour sauver son peuple.
Et vous croyez que c'est tout ? Que nenni ! Ce film est un grand concentré de n'importe quoi. Ainsi, on y trouve un ancêtre du sabre laser (Persée serait-il le premier Jedi ?), des Djinns (tiens, je croyais que c'était plutôt arabe, les Djinns) et des scorpions géants transformés en autobus.
Ah, j'oubliais : pour appeler Charon, le fameux nocher qui mène sa barque vers les Enfers, il faut faire des ricochets dans l'eau, façon Amélie Poulain sur le Canal. Mais bien sûr...
Oh, et puis, vous ne trouvez pas que toute cette expédition ressemblait un peu à la Communauté de l'Anneau...
Alors, forcément, avec ça, les acteurs font ce qu'ils peuvent. Même des interprètes que j'apprécie (Neeson, Fiennes, Postlethwaite, Mikkelsen) ont, dans le regard, comme un message d'excuse auprès de leurs fans, du genre "J'ai des factures, moi aussi".
Et si même les acteurs capables d'être bons sont mauvais, que dire de Sam Worthington ? Rien, je crois. La meilleure solution, c'est de ne même pas citer son existence (n'offensons pas les dieux plus qu'ils ne le sont déjà).
Mais, comme un homme plongé au plus profond de l'Enfer voit, soudain, la faible lumière d'un espoir surgir à l'horizon lointain et sent alors ses forces revenir au triple galop, j'ai vu, ici, dans cette véritable leçon de cinéma (leçon de ce qu'il ne faut pas faire, bien évidemment), une lumière qui a irradié à travers mes yeux qui saignaient. Gemma Arterton... Elle joue le rôle de Io, et ce fut un régal. Ses tenues courtes furent un grand plaisir des yeux également, et j'avoue avoir attendu longtemps qu'elle fasse tomber sa tunique. En vain... Mais qu'importe, c'est à elle seule que je dédie l'unique point que j'attribue à ce film (attention, c'est purememnt physique, parce qu'elle joue très mal également).