Il faut se rendre à l'évidence, Jean Boyer est un honnête réalisateur qui connait son métier, mais dans ce film on sent la patte omniprésente de Fernandel, ce qui fait que le résultat est un immense gâchis dans lequel il serait vain de chercher la cohérence. Car enfin on a au début deux séances fabuleuses entre Ginette Leclerc et Fernandel, tous deux réprouvés par la société l'une parce que prostituée l'autre parce que chômeur patenté, et qui s'en consolent en buvant puis en allant faire les fous sur un manège en une séquence merveilleuse. Puis arrive le curé, et là ça ne va plus du tout, alors que le film fait preuve d'un anticléricalisme de bon aloi, le curé lui est sentencieux, sans défaut et va remettre le Fernandel dans le droit chemin. Autant dire que ça devient aussi ridicule qu'incohérent, Une séquence qui aurait pu être géniale est celle où le bedeau veut payer Ginette Leclerc avec la recette des troncs de l'église ! 313 francs plus des boutons de culottes, même pas le prix d'un kilo de haricots, Ginette rit de bon cœur et quand le bedeau s'enfuit au grand dam de Fernandel, ce dernier ne trouve rien de mieux que de gifler la fille en la traitant de garce ! Qu'on nous explique et du coup la scène est foutue en l'air ! Mais le pire c'est sans doute la rédemption du sonneur de cloches, une séquence d'une bêtise abyssale qui précède les conclusions poussives en cascades, toutes dédiés à l'ordre bourgeois enfin retrouvé. Dans le privé et dans la profession Fernandel était tout différent de son personnage public, il était autoritaire, suffisant et calotin, il a imposé son personnage à Boyer qui pas fou l'a laissé faire en préférant mettre en valeur Ginette Leclerc et de quelle belle façon, elle qui nous gratifie de son sourire, de sa gouaille et même de sa poitrine dénudée. De ce film on ne retiendra que ça : la première partie et Ginette Leclerc, c'est toujours ça !