Don jouant
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Voir ou revoir Le Ciel peut attendre à l'aune des relations femmes/hommes d'aujourd'hui ne manque pas d'intérêt.
Le film de Lubitsch raconte en effet, sur le mode rétrospectif, la vie d'Henry Van Cleve, un séducteur invétéré qui du haut de ses 10 ans découvre, non sans en tirer quelque enseignement, que pour se faire accepter de la gent féminine il vaut mieux ne pas lâcher l'affaire mais surtout s'attendre à payer en monnaie de scarabées ! On retrouve ensuite notre Casanova en culotte courte à diverses étapes de sa jeunesse puis de sa vie conjugale passée auprès de sa femme Martha (Gene Tierney éblouissante) mais pas que !
Car le mode opératoire de cet homme qui aimait les femmes est on ne peut plus entreprenant : le voici à cabotiner avec la femme de chambre à l'accent si délicieusement parisien, à séduire une cliente en quête de lecture en se faisant passer pour un libraire, à enlever la fiancée de son cousin au nez et à la moustache de celui-ci et enfin à tenter sa chance auprès d'une danseuse de l'âge de son fils ! Henry déploie de scène en scène tout l'apanage du séducteur immoral, menteur et quelque peu machiste. Le moment où Henry convainc Martha de l'embrasser puis de filer à l'anglaise le jour même de son mariage avec un autre (le cousin fort marri) est une illustration tout à fait frappante de cette drague "à l'ancienne" : il l'approche, elle recule, il insiste, elle refuse, il l'entreprend, elle s'offense, il s'impose, elle s'esquive et pour finir il l'embrasse...au refus de son plein gré. En somme, de l'art d'importuner avec opportunité : l'importunisme !
Mais voilà, ce Henry, aussi cabotin, harceleur et entreprenant soit-il ne donne jamais le sentiment d'être l'individu déplaisant auquel on pouvait s'attendre (C'est d'ailleurs un des enjeux du film puisqu'il se présente tout contrit devant le Diable réclamant son indulgence). D'abord car Henry importune les femmes qu'il désire certes mais jamais sans tact et humour. Mais surtout parce que dans le jeu de la séduction que Lubitsch met en scène, les femmes ne sont jamais victimes, ni faibles, ni réduites à leur apparence. Ainsi de Martha qui a bien compris tout l’intérêt qu'elle aurait à échapper à ce triste cousin à qui elle se destinait en se laissant séduire par Henry, Martha qui connait son mari sur le bout du nez et n'est jamais dupe de ses petits et gros mensonges. Ou encore la mère Strabel qui tient la baraque - et surtout les bandes dessinées - face à un mari monolithique qui peut grogner tant qu'il veut mais de toute façon, c'est pas lui qui commande ! C'est ainsi chez Lubitsch, un maître es psychologie, les plus forts ne sont jamais ceux qui s'imaginent l'être : les hommes papillonnent tandis que les femmes brillent d'intelligence et de malice.
Un film par ailleurs remarquablement réalisé. Seul le scénario davantage construit comme une suite de sketches que comme une véritable histoire m'a paru un peu faible car trop décousu et oubliant en cours de route la plupart des personnages. Des personnages que l'on se prend à aimer - même les moins sympathiques a priori - et que l'on aurait aimé suivre jusque bout. Seul regret donc en ce qui me concerne pour ce film très plaisant.
Personnages/interprétation : 9/10
Réalisation/mise en scène : 9/10
Scénario/histoire : 7/10
8/10
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Créée
le 21 févr. 2018
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