Première adaptation du Facteur Sonne Toujours Deux Fois de Cain, mais bien vite évincée par la seconde adaptation en 1942 de Visconti avec Les Amants Diaboliques.
Il est vrai que le film de Pierre Chenal souffre de la comparaison avec le premier film de Visconti, qui lança par le biais de ce film le mouvement néo-réaliste. Face à un film de cette envergure, il est légitime de mettre aux oubliettes Le Dernier Tournant, souffrant d'une réalisation très classique et d'un format peut-être trop expéditif au vu des possibilités qu'offre le roman.
La Belle, la Bête et le Prince.
Même si Le Dernier Tournant souffre de la comparaison avec son successeur, il est malgré tout injuste de le reléguer au rang des dispensables. Alors certes, le casting est, dans l'ensemble, moins bon, mais sauvé par la présence de Michel Simon. Une gueule et un jeu de Simon parfaitement en accord avec ce qu'on attend de ce mari cocu et provoquant le dégoût de son épouse. À mes yeux, en plus de sauver le film, Michel Simon livre une prestation bien supérieure, à celui qui héritera de son personnage trois ans plus tard. Mais dépendant de Simon, Chenal prend le risque de déséquilibrer son film, en deux parties de qualités bien distinctes. Le pari du réalisateur français aurait été réussi, si dans la première partie l'attirance et la relation des deux amants avaient été plus étoffées. Permettant d'avoir une certaine sympathie pour ce couple et maintenir un intérêt pour le sort de ces amants apprentis meurtriers. Même si la prestation de Corinne Luchaire (la femme) reste convaincante dans cette partie, le rythme reste beaucoup trop soutenu pour être crédible et faire naître une quelconque émotion. Maladresse qui sera bien entendu évitée par Visconti. Il est d'ailleurs intéressant de constater les différences entre ces deux premières adaptations, et les situations éclipsées dans le scénario de Chenal.
En somme, un film agréable, ne souffrant d'aucuns temps morts, mais lui jouant quelques mauvais tours. Dont les principales réussites tiennent à une mise en scène parfois audacieuse, et une ambiance sombre et cruelle très bienvenue. Un film « noir » à savourer avec modération.