Et le droit à la subtilité, est-ce de l'ordre du possible ?
Je serai très curieux de connaître un peu plus l'allemand car la traduction française du titre n'est pas l'exacte traduction de l'original. Je mettrai même ma main au feu qu'il existe dans le titre allemand une subtilité, pourquoi pas un jeu de mots, un je ne sais quoi que je n'arrive pas à déceler. Le terme Faustrecht par exemple semble dire "poing droit"...
Cela dit, il ne faut pas être nécessairement germanophone pour voir les titres diffèrent et cela a une importance pour moi.
Alors j'ai fait appel à un vieux germanophone spécialisé en droit antique grec, le dénommé Sencritchaïev :
OV - "Alors Pr. Senscritchaïev, bonjour. Vous avez écrit un livre sur la jurisprudence en terme de droit commercial de la pêche dans les zones du Pacifique Sud. Ce qui m'amène à vous poser une question essentielle. D'après vous, qu'a voulu signifier Fassbinder avec son titre ?
Pr. Senscritchaïev - "Faustrecht, c'est l'expression pour dire la loi du plus fort, la loi de la jungle (mot à mot : le droit du poing).
Freiheit c'est la liberté, et là il est génitif, donc oui c'est un jeu de mot, ou plutôt une sorte de mot valise qui fait clin d'oeil : littéralement, c'est le droit de la jungle de la liberté.
Sans entrer dans des détails, le droit de la liberté, c'est une notion juridique (le nomos grec, droit naturel issu de la jurisprudence). Il est opposé au droit de la servitude (lex). C'est en gros le droit que doivent faire appliquer les juges, non d'après des lois purement humaines, mais en se référant à un ordre général sous-entendu comme bon et favorable, préexistant à la Société.
Accoler la loi de la jungle à ce droit censément juste, c'est assez subtil, justement. C'est sous-entendre avec deux mots que la loi censée être impartiale est du coté des plus forts, car instituée par elle, uniquement pour continuer à soumettre en toute impunité les plus faibles, sans aucun progrès social par rapport à la loi de la jungle."
Merci Pr. Senscritchaïev ! Tout de suite, c'est plus clair.
Pour moi aussi, les films qui mettent en relief les déterminismes sociaux sont importants. J'y suis sensible. C'est pratiquement une croyance à vrai dire puisqu'encore aujourd'hui une grande majorité des individus considèrent avoir pris au cours de leur existence des choix libres, d'avoir disposer de cette liberté en biens et en esprit. Ou alors, je me trompe et tout le monde me ment, préférant par là même se protéger ou se créer des mirages pour trouver la vie moins triste. C'est important aussi de ne pas se laisser attraper par le cynisme contemporain ou l'humiliation... ou par l'imposture.
Qui ne s'est pas demandé un jour ce qu'il ferait en gagnant une grosse somme d'argent ? De là, nous rêvons à des projets égoïstes. On pense à ce qu'on ferait pour les autres, à commencer par sa famille et ses amis. Est-ce qu'on arrêterait le travail ? Est-ce qu'on ferait des voyages pour finalement s'installer en Suède sur une île calme et humaine ? Ou bien en Espagne pour n'avoir qu'à se préoccuper du soleil et de ses ennuis ? Est-ce qu'on y serait heureux ? Est-ce qu'on verrait toujours nos amis ? Est-ce qu'on serait assis à la table d'un conseil d'administration d'une firme qui gère les marchés financiers d'autres entreprises ? Est-ce qu'on changerait nos habitudes et nos loisirs ? La déco ?
En aurait-on seulement la possibilité ? - intéressante mise en oeuvre, je dois reconnaître.
Mais "Le droit du plus fort" ne correspond pas à mes attentes sur le sujet.
Je trouve que le sujet est grossièrement traité et que les situations ne permettent pas d'avoir une lecture correcte. Pourtant, tous les éléments sont là pour mener à terme ce projet : comme souvent, Fassbinder crée une situation où les éléments incubent comme dans une expérience scientifique. Sur ce point, je trouve très bien d'avoir relégué les femmes en arrière plan ainsi que l'esthétisme de la scène de la séparation. La réalité du film est assez décevante puisqu'avec les caricatures, cette expérience capote et file sur des rails tout tracés. Si tracé que je ne vois ni élan ni intérêt d'énumérer les qualités et les habitus qui provoquent les immobilités et la stigmatisation. J'aurais cru que Fox aurait été plus rusé qu'un renard... Enfin, un minimum de ruses.
Je suis plus sensible à des films comme L'esquive, la vie est un long fleuve tranquille ou La raison du plus faible. Mais il y en a sûrement d'autres ! Tout comme j'ai apprécié d'entendre "le Métèque" de Moustaki dans ce film-ci.
Sur ce, je lance deux appels :
*Amis cinéphiles, quels sont les autres films qui évoquent les déterminismes sociaux ou les remettent en cause, de manière significative s'entend ?
*Ami travailleur, que ferais-tu d'une grosse somme d'argent ?