Silencieux commentaire de la vie retirée
Une année du monastère de la Grande-Chartreuse.
Égrené de quelques versets bibliques somptueusement choisis – quoique ressassés de façon parfois un peu lassante –, le film est monté comme un vaste et silencieux commentaire de la vie retirée. Du coup, à vouloir montrer l'intime, il fallait faire style d'un rythme lent et de la longue durée (plus de deux heures et demi). Au spectateur de développer une patience et, à cette occasion, de moins en moins fréquente, de laisser s'installer un autre type de sensibilité.
Certes, on pourrait critiquer certains parti-pris esthétisants, quelques lourdeurs de style parfois, ou reprocher au cinéaste de ne pas faciliter l'accès à son sujet – mais je ne pense pas que, sauf à mentir, cet accès puisse être facile – ; on serait tenté de demander, encore, un peu plus de détail sur la vie économique du monastère et ses rapports au monde – mais je gage qu'il existe déjà toute une documentation sur ce sujet – ; ou un plus vif éclairage sur la vie intérieure, les motivations, les résistances et les joies de chacun de ces moines – mais il aurait fallu briser la compacité du fond sonore (bruits naturels et artificiels, rares conversations, rires...) et rompre la continuité de l'expérience du spectateur pour y réintroduire une position d'extériorité, celle du juge ou du porteur de polémique, d'accord-pas d'accord : là n'était pas l'enjeu.
Lent déroulé des images, jeu des textures, irritant pour plus d'un, mais à mon sens marque du décalage entre le silence de la vie monacale et le bavardage du monde, densité de la présence de ceux-là qui sont parmi les derniers dépositaires d'une (authentique) spiritualité occidentale, et l'impérieuse insistance des paysages de Chartreuse... J'ai été touché, profondément. Il n'y a guère plus que je puisse en dire.
(pour que les choses soient claires : je ne suis pas chrétien et n'ai aucune prédisposition à l'heure actuelle pour le devenir)