Je viens de finir The Graduate, il est 23h28.


Enfin je l'ai fini il y a une bonne trentaine de minutes mais j'essaie de redescendre un peu. Mes yeux sont humides, très humides mais aucune larme n'a coulé attention. The Sound of Silence de Simon & Garfunkel résonne dans mon salon pour la sixième fois d'affilée, presque sans interruption.


SPOILERS à venir !!!


Comment pourrais-je parler de ce film, The Graduate? Le lancer en espérant passer un moment sympathique c'était prévu, le finir au bord des larmes ça en revanche ça ne l'était pas. On commence ce film avec un certain Dustin Hoffman, quasiment inconnu à l'époque, qui se laisse guider par un tapis roulant dans un aéroport, revenant avec son diplôme dans les valises. Musique aidant, j'ai déjà adoré l'introduction. Par la suite, j'étais presque Dustin Hoffman, je vivais la scène avec lui. Ce jeune homme cloisonné socialement, prisonnier de cette société. Je repense à ce passage dès le début du film où Ben, Dustin Hoffman donc, tente de s'éloigner de la réception donnée en son honneur. Ce passage est un plan-séquence qui ne le lâche pas d'une semelle, il veut s'enfuir, la caméra le suit, les invités l'abordent sans cesse, alors qu'il est sur le point de s'échapper il est abordé de nouveau, il se retourne, est de nouveau abordé, plus que jamais il veut s'enfuir... Mais tout ça n'est dit par personne, pas de voix-off, rien. C'est juste l'image qui nous parle, rarement on verra une mise en scène aussi adaptée à son sujet: l'enfermement. Non seulement c'est beau mais en plus c'est intelligent et ça fourmille d'idées.


La première rencontre avec Mrs Robinson nous plonge dans le même état que le jeune Ben. Déstabilisé, intrigué, apeuré et tenté. De l'image naît le désir, désir qui envahit le jeune homme qui pour la première fois goûtera aux plaisirs charnels. Ce qui semblait le libérer l'enfermera de nouveau au contraire. D'abord parfaitement soumis aux carcans de la société, puis soumis à ceux de cette femme, on sentira ce vent de liberté animer le jeune Ben qui suivait parfaitement l'ordre établi (ou n'importe quel ordre qui venait se mettre sur son chemin) et progressivement on le verra sortir de cet état d'asservissement.
0H08 déjà? Oula, il faut dire aussi que The Sound of Silence tourne au moins pour la quinzième fois et je plane littéralement, je retourne dans ce chef d'oeuvre (oui oui appelons un chat, un chat). Puis ce film brasse aussi un peu toutes les émotions. Tantôt drôle (cette surprenante combinaison, la scène de l'hôtel, tantôt dramatique (la scène de la révélation à Elaine), juste prenant pour ma part. Au fur et à mesure que je sentais le personnage renaître, je m'accrochais de plus en plus à lui. Une véritable empathie s'est développée en somme. Le personnage semblait agoniser dans son cloisonnement socio-familial, il se libérera, tombera amoureux de la fille qu'il a revu récemment après avoir voulu tout gâcher volontairement pour une simple histoire de cul.


La dernière demi-heure est mémorable (au même titre que le reste du film ne nous méprenons pas). Tout s'enchaîne rapidement, Ben veut prendre les décisions seul... Et vite, il faut rattraper le temps perdu, vivre sa vie. Il va épouser Elaine annonce-t-il à ses parents. Elle ne le sait pas encore? Tant pis, je fonce. Ce film ne vise pas le réalisme à mon sens, la décision peut paraître précipitée mais vu le degré de qualité de la mise en scène je pense que tout cela reste une belle métaphore de la soif de liberté. Nichols osait carrément la métaphore au premier degré avec cette fabuleuse séquence où Hoffman est forcé d'entrer dans une piscine en combinaison d'où il n'entend rien, poussé au fond par ses parents. L'obligeant à bien suivre l'ordre établi pour ne pas y échapper. Putain ce que c'est brillant, que ce soit au niveau du propos ou de la mise en scène. Je crois que ce qui m'a définitivement séduit c'était de voir ce film partir en roue-libre avec un côté quasiment nihiliste qui repousse tous les codes de la romance habituelle. La scène du mariage à la fin m'a définitivement terrassé. Il y a une intensité émotionnelle qui se dégage de cette séquence... C'est vivant, et ça fait du bien de voir des personnages vivre au cinéma. Le plan final les montre tous deux assis au fond d'un bus, cette société les regardent bizarrement, ils s'en foutent, ils sont jeunes, ils voient devant, ils voient vers l'avenir. Et doutent. Fin du film, The Sound of Silence continue de résonner. Je reste dans l'intensité de la scène finale sans redescendre immédiatement. Je vis encore le film.


Et au fond, au même titre qu'un Ben Braddock qui ressent des émotions et prends des décisions spontanément, je tombe spontanément amoureux de ce film. Il est 0h25, mes paupières sont lourdes mais je me sens revivre moi aussi, et pourtant je vivais très bien jusque là et les jours précédents furent excellents aussi. Puis je suis de ce genre de personnes qui veulent vivre à leur façon, je suis de ce genre de personnes qui se défoncent par amour, je suis de ce genre de personnes qui au fond n'ont pas envie de refouler leurs émotions. Et ce film m'a particulièrement parlé. Loin d'être un bête porte-étendard de l'anti-conformisme, The Graduate est un hymne à la vie, un hymne à l'espoir. Le genre d'oeuvre capable de me marquer jusque la fin de mes jours et de me donner envie de vivre, d'aimer, sans regarder derrière...

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le 17 juil. 2013

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Moorhuhn

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