Le Monstre Magnétique est un film à budget minuscule de Curt Siodmak, à qui on doit le scénario du Retour de l’homme Invisible, et de Vaudou de Jacques Tourneur.
C’est un film indépendant de science-fiction réalisé au moment où la première centrale nucléaire est entrée en service.
L’histoire commence dans un magasin d’électroménager, dans lequel les appareils sont devenus fous : les horloges n’indiquent pas la bonne heure, une tondeuse se promène dans les allées, les capots des machines à laver claquent en rythme, une vendeuse paniquée nous expose sa glotte.
Pour remédier à cette situation inacceptable, Jeffrey Stewart (Richard Carlson) et Dan Forbes (King Donovan) deux agents du Bureau d’Investigations Scientifiques viennent mener une enquête SCIENTIFIQUE avec des instruments de mesure qui font bip et une canne à pêche en bambou. Après avoir jeté une poignée de clous au plafond, le diagnostic est clair : un puissant champ électromagnétique venu d’en-haut est à l’origine de ce capharnaüm.
D’un gros aimant entreposé à l’étage du dessus, me direz-vous ?
MAIS NON.
D’UN AVION SURVOLANT LA VILLE A CET INSTANT. (Tout à fait).
En effet, à ce moment-là, on entre dans l’avion qui est probablement en vol stationnaire depuis plus de trois heures pour laisser le temps aux inspecteurs d’arriver dans le magasin, l’un des passagers, agrippé à une mallette en cuir qu’il refuse de remettre à l’hôtesse de l’air, semble ne pas aller bien du tout. Il explique qu’il transporte un élément si dangereux qu’il va probablement en mourir.
Un membre héroïque de l’équipage contacte Jeffrey et Dan pour qu’ils viennent récupérer l’élément du chaos, puis met la mallette en sécurité dans les toilettes de l’avion en la portant grâce à la canne d’un passager aveugle (retrouvera-t-il son bâton ? la réponse… jamais).
Sur le tarmac, une camionnette SCIENTIFIQUE est dépêchée pour venir récupérer l’élément et le transporter vers une base SCIENTIFIQUE par des SCIENTIFIQUES pour y réaliser des expériences SCIENTIFIQUES destinées à déterminer la nature du grand méchant.
Oui. Le méchant de ce film est une pépite grande comme trois pois secs nommée sobrement « THE ELEMENT ». Voilà donc ce « monstre magnétique ». Cet élément est capable de faire apparaître des courbes lumineuses sur des écrans en carton, d’allumer des ampoules sur un tableau lumineux, et de s’illuminer comme les bâtonnets qu’on plante sur les gâteaux d’anniversaire. Il constitue donc une menace pour la planète entière.
« Cet élément va modifier l’équilibre de la Terre ! Elle va sortir
de son orbite et se perdre dans l’espace ! »
Une seule solution : le détruire.
Sorti deux ans après l’entrée en service de la première centrale nucléaire au monde, et 8 ans après l’explosion des bombes H au Japon, ce film traduit surtout la grande angoisse mondiale concernant le nucléaire qui caractérise la Guerre Froide.
Le souci, c’est qu’en plus d’être ultra cheapos, ce film a la même validité dans ses propos scientifiques qu’un de mes élèves de SEGPA jouant à chat-bite lors d’un dîner à la Maison Blanche. La voix off qui est censée expliquer les procédés et le matériel utilisés par les scientifiques semble avoir été écrite par l’un de ces mêmes élèves lors d’un exercice d’écriture d’invention. Il n’y a aucune logique dans les réactions de personne, les émotions que l’on essaye de communiquer au spectateur sont annulées par le cabotinage des acteurs.
J’ai passé un grand moment de rigolade devant ce film. Les décors en carton et en boîtes de conserves sont adorables. Les explications débiles sont à mourir de rire. Les acteurs y croient si fort que ça en devient mignon. Le jargon scientifique est balancé comme des poignées de confettis.
Bref, c’est un nanar. C’est nul. C’est pas cher. C’est rempli de bonnes intentions, mais c’est raté.