Le dernier court-métrage de Chaplin, le dernier aussi où il joue en compagnie d’Edna Purviance, sans aucun doute un des meilleurs. Le scénario est puissamment élaboré, presque digne d’un long métrage. Abandonnant le personnage de Charlot, Chaplin y joue le rôle d’un prisonnier évadé qui dérobe les habits d’un pasteur et se retrouve à sa place dans le temple puis au domicile du bedeau, dans une société de fidèles. On a souvent comparé ce film au Tartuffe de Molière. On y trouve en effet la même dénonciation de la bigoterie puritaine et hypocrite, au grand dam des puissantes ligues de vertu américaines qui lui en tiendront rancune jusqu’au bout. Les gags, d’un haut effet comique, s’enchaînent avec une précision encore accrue, toujours dans le sens de la construction du récit. Le personnage apparaît peu à peu dans toute son humanité, déjouant les tentatives d’un ancien co-détenu pour voler l’argent du foyer où se trouve la jolie jeune fille dont il est tombé amoureux. À la fin, il sera bénéficiaire en raison de ses bonnes actions des largesses d’un shérif indulgent qui le laissera partir vers le Mexique… Mais la paix n’étant pas plus assurée dans ce nouveau pays, il marchera à cheval sur la frontière, exposant ainsi ses difficultés à vivre dans une quelconque société. Quelques mois plus tard, Chaplin tournera son premier long-métrage, L’Opinion publique, encore avec Edna Purviance mais où il ne tiendra aucun rôle d’acteur.