Un très bon Billy Wilder. Peu de films dans l'histoire du cinéma traite aussi frontalement des ravages de l'alcoolisme. Est-ce pour cette raison qu'il reste une référence en la matière ?
Auréolé de plusieurs prix prestigieux mérités (Oscars, Festival de Cannes), le film étonne par sa fluidité et sa modernité, 70 ans après sa sortie. Mon seul bémol, avec le happy-end, reste une bande originale trop présente, peu subtile, voire écrasante, comme souvent dans les films américains des années 30 et 40.
L'histoire, simplissime, se concentre intelligemment sur la descente aux enfers d'un homme, prisonnier de sa dépendance maladive. Peinture réaliste et d'une grande noirceur, le film effraie et vous convainc de ne jamais "tomber dans l'alcool" ou quelconques drogues... L'interprétation saisissante de Ray Milland y est pour beaucoup. Il ne joue pas, il incarne. C'est ainsi que Billy Wilder nous entraîne dans la virée éthylique de son anti-héros, pauvre bougre désespéré, seul face au dégoût de lui-même, perdant son honneur, sacrifiant ce qui compte le plus pour lui, tombant dans le ruisseau, jusqu'aux frontières du précipice, prêt à tout pour avoir une bouteille où un seul verre... Des scènes qui vous restent durablement en mémoire. Impossible d'échapper au cauchemar qui défile sur l'écran. Billy Wilder n'évoque pas, il choque, il interpelle le spectateur, son but étant de provoquer une prise de conscience radicale sur les méfaits du "poison". Exemples:



  • pendant l'Opéra, l'obsession de la bouteille, juste avant la rencontre de Don et Helen,

  • l'humiliation publique après le vol dans le cabaret qui se solde par une "évacuation" manu-militari,

  • son errance "malheureuse" dans Manhattan pour trouver un prêteur sur gages, y laisser sa machine à écrire, dernier vestige de son ambition perdue...

  • la séquence du centre de désintoxication, et la scène d'hallucination, dignes des plus grands films d'angoisses


Pour autant, restent ceux qui l'aiment et le respecte. Helen, sa bien-aimée, qui contre vents et marées, s'accroche avec l'énergie du "désespoir-espoir", et le fidèle Nat, le barman, véritable "ange gardien". Essentiels, malgré toute l'énergie dépensée par Don pour tenir à distance, l'une, et mettre l'autre dans sa poche, ce qu'il ne réussira pas.


Le grand reproche à faire au film, c'est son happy-end, qui tranche trop avec la noirceur du film. Pas vraiment crédible, il apparaît comme écrit à l'emporte-pièce, alors qu'il aurait fallu un traitement plus ample et plus long pour esquisser la sortie d'une telle descente aux enfers. Cependant, si l'on fait l'impasse sur cet ultime et seule "faiblesse" scénaristique, Billy Wilder atteint son objectif.

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le 16 juin 2015

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