Le Prince de New York par Nicolas_Milanes
Adaptation du livre de Robert Daley retraçant le parcours de l'inspecteur Robert Leuci et sa coopération avec la commission Knapp, "Le Prince de New York" reste à mon sens l'un des meilleurs films de Sidney Lumet. Ce n'était pas la première fois que le metteur en scène abordait le thème de la corruption policière et il voyait d'ailleurs en ce projet le moyen de corrigé l'erreur qu'il eut faite sur "Serpico" de présenter les agents de police de façon bi-dimentionelle.
C'est toute la complexité des inspecteurs qui est ici mise en avant et cela à tous les niveaux. Lumet s'intéresse d'ailleurs plus à la psychologie des personnages et aux rouages du système judiciaire plutôt qu'à la corruption en elle même. Le réalisateur ne porte aucun jugement sur les multiples malversations commises par les représentant de la loi ni même sur ceux de l'inspecteur Danny Ciello, laissant ainsi libre cours aux spectateurs de se faire leurs propres opinions que ce soit sur ce dernier ou sur ses collègues.
Inspiré de l'inspecteur Robert Leuci, Ciello est le type même du policier n'hésitant pas à recourir à tous les moyens pour obtenir ce qu'il veut. Allant du vol d'argent appartenant aux criminels qu'il coffre jusqu'à fournir de la drogue à ses informateurs les plus accrocs, le jeune policier n'est guère différent de ses collègues, bien au contraire. C'est d'ailleurs les multiples actions illégales qu'ils commettent qui font qu'ils soient si proche les uns des autres.
"Je dors avec ma femme mais c'est avec mes collègues que je vis!" - Danny Ciello
En collaborant avec le bureau du procureur Ciello se met en marge. Ces équipiers s'éloignent de lui, il est sur la liste des principales cibles de la mafia new-yorkaise et sa famille mise sous protection policière. Il est également manipulé par les membres de la commission Chase qui, bien que lui ayant fait la promesse de ne pas l'obliger de déposer contre ses collègues, finissent pourtant à le pousser dans ce sens.
Menacer et malmener par ceux qui se présentait en premier lieu comme des alliés, ces derniers n'hésite d'ailleurs pas à le soumettre à des interrogatoires de plus en plus humiliant et déstabilisant, Ciello est en fin de compte celui qui paie le plus lourd tribut. Bien qu'échappant aux poursuites le jeune inspecteur est pourtant loin de s'en sortir sans dommages. Méprisés par ceux qui voient en lui une balance il est également mal vu par les autres qui, du fait des multiples exactions qu'il a commit, ne peuvent savoir si il est digne de confiance.
La séquence final est la parfaite représentation de la façon dont le flic est perçut une fois l'affaire terminer. Présentant le premier cours qu'il donne à l'école de police, l'un des officiers lui demande si il est le fameux inspecteur Ciello. Après avoir répondu à la question le policier s'entendra dire par la recrue : "Alors je n'ai rien à apprendre de vous"! Il est évident que Ciello comprends le point de vu du jeune policier mais aussi qu'il pense au fond de lui que celui ci ne connaît rien du travail de terrain et de la rue. La recrue le juge sans avoir la moindre idée de comment les choses fonctionnes au contact de la réalitée.
Lumet tenait ici à nous offrir un point de vu réaliste sur la corruption policière et sur la façon dont celle-ci touche autant physiquement que psychologiquement ceux qui y sont au centre. "Le Prince de New York" est à mon sens une oeuvre particulièrement réussit tant au niveau de sa mise en scène que des thèmes que son scénario exploite. Un film incontournable dont la durée pourra en rebuter plus d'un mais qui dans mon cas ne m'a pas gêner le moins du monde tant il est passionnant. Un grand moment de cinéma!
En quelques mots: "Le Prince de New York" est un film particulièrement fort dramatiquement et qui arrive autant à nous émouvoir qu'à nous plonger dans une atmosphère à la tension quasi-insoutenable. Mention spéciale à la performance habité d'un Treat Williams qui venait de connaître le succès avec "Hair". L'acteur avoue s'être sentit trop inexpérimenté à l'époque pour jouer un personnage aussi fort dramatiquement parlant et que le fruit de sa performance repose autant sur Lumet que sur lui. Le réalisateur fut en effet l'ange, le professeur et l'ami de Williams (d'après le propre aveu de l'acteur) et cela durant tout le tournage. Je ne saurais trop recommander "Le prince de New York" car c'est autant, de mon point de vu en tout cas, l'un des meilleurs films du metteur en scène que des années 80.