Le regard porté par Le Puits et le pendule sur le Moyen Âge finissant est influencé par une série d’œuvres américaines antérieures parmi lesquelles se trouvent surtout La Chair et le sang (Paul Verhoeven) et Excalibur (John Boorman) qui posent une grille esthétique et représentative faite d’âpretés de toutes sortes, de violence explicitement montrée au sein d’une reconstitution soignée – sources historiques à l’appui – et pittoresque. Stuart Gordon y ajoute et ainsi rend légitime une horreur appuyée qui est caractéristique de sa patte cinématographique. Il convient donc de ne pas lire cette adaptation d’une nouvelle signée Edgar Alan Poe justement comme adaptation littérale – puisque ne sont conservés que quelques éléments liés au pendule ainsi que l’atmosphère générale – mais comme base imaginative de laquelle vont se croiser et s’entrechoquer des hommes et leurs croyances. La thématique chère au réalisateur se retrouve déclinée d’une manière particulièrement intéressante, à savoir la capacité d’un être à se réfugier derrière une autorité exercée de manière aveugle pour justifier ses atrocités et ainsi incarner ses frustrations propres. Dolls : les poupées le montrait déjà ; ici le fanatisme religieux découlant directement de l’Inquisition espagnole est abordé sous l’angle d’une procédure tyrannique hors du contrôle papal, ou plutôt sous le monopole d’un fou furieux qui renversa les autels pour y ériger, en lieu et place, les siens ; sous l’angle de la déformation d’un culte chrétien au service d’une politique de la terreur. Figures parentales qui asphyxiaient l’enfant dans Dolls, Père Inquisiteur qui torture ses ouailles, par conséquent ses fils et filles (symboliquement) ici telle l’incarnation terrestre d’une volonté divine impitoyable. En somme, un homme confronté à son propre enfermement charnel et aux sévices infligés pour tenter d’y remédier. Très belle mise en scène de Stuart Gordon, images marquantes et prestations excellentes font du Puits et le pendule une œuvre forte qui, malgré ses lourdeurs scénaristiques (notamment l’extrême fin), fascine et interroge.