The Shadow of the Cat semble terrifié à l’idée que sa menace, faute d’une mise en scène suffisamment inventive et forte, ne suffise pas à traduire à l’écran le cauchemar paranoïaque d’Edgar Allan Poe ; aussi se sent-il contraint de forcer le trait, de répéter les séquences, d’insérer une musique ampoulée qui appuie excessivement le suspense, de filmer le chat à la manière d’un monstre – il n’y parvient d’ailleurs jamais – qui lui ôte tout mystère. Où sont passées les prunelles mystiques dont Baudelaire chantait les louanges ?
Le seul intérêt du long métrage de John Gilling est de se saisir du chat comme d’un foyer optique au travers duquel les remords et sentiments de culpabilité convergent vers leurs détenteurs dans un reflet déformé et angoissant. De nombreux plans flous tentent de rétablir la perception du chat, grâce à une lentille particulière qui déforme l’image. L’animal est partout, allégorie d’une mauvaise conscience qui plane sur la vaste demeure comme une malédiction ; nul hasard, par conséquent, si le testament authentique se trouve caché derrière un tableau représentant le chat. Il se repaît alors du spectacle qu’il a sous les yeux et qu’il provoque par de simples irruptions, soucieux de venger sa maîtresse d’une famille ingrate et aristocratique dans ce qu’elle peut avoir de plus répulsif.
Il est alors dommage que le réalisateur ne fasse davantage confiance à sa mise en scène dont la puissance de suggestion, lorsqu’elle est à l’œuvre, fonctionne bien mieux que ses gros plans sur le félin, tentant désespérément d’en extraire quelque chose de diabolique.