Même si je suis de moins en moins fan de found footage , le film Leaving D.C. attisait une certaine curiosité chez moi sur la promesse de revenir vers l’essence horrifique d'un Projet Blair Witch. Il est important de préciser que le film est l’œuvre d'un seul et unique bonhomme, autodidacte et quasiment amateur qui a décidé d'extrapoler une expérience personnelle pour en faire un film d'ambiance qui ne cache pas son inspiration envers le film de Daniel Myrick et Eduardo Sanchez. A la fois réalisateur, producteur, scénariste, technicien , monteur et acteur Josh Criss s'inspire de son propre retour à la ruralité après avoir fuit la ville quand il fut réveiller en pleine nuit par d'étranges bruits venant de la forêt qui entourait sa maison. Il a alors imaginer que ce bruit revienne de manière systématique et régulière jusqu'à le faire sombrer dans l'angoisse.
Leaving D.C. raconte donc cette histoire d'un type qui quitte la ville pour s'installer dans une maison isolée et paumée dans une immense forêt. L'homme se filme pour envoyer régulièrement des vidéos à ses amis d'un groupe d'entraide dans une sorte de journal de bord quotidien. Réveillé en pleine nuit par un bruit inquiétant qu'il ne parvient pas à identifier, l'homme décide d'enregistrer les sons extérieurs durant toute la nuit et découvre que des perturbations interviennent de manière cyclique autour de trois heures du matin. Entre angoisse et volonté de comprendre il décide de continuer d'enregistrer et installe des caméras de surveillance.
Leaving D.C. est un film assez difficile à noter tant j'ai hésité entre le 03 et le 06/10. La mécanique de ce type de found footage étant de traquer l'étrange au cœur du néant et du quotidien, on pourra reprocher au film de longuement exposer du vide. Inutile en effet d'espérer des effets spéciaux, du spectaculaire et des jumps scares à gogo, les séquences les plus spectaculaires de ce Leaving D.C. sont un type qui décortique des enregistrements audio devant son écran d'ordinateurs. Et bizarrement ça fonctionne plutôt bien car on épouse en tant que spectateur le point de vue de ce personnages qui regarde chaque matin la ligne de ses enregistrement sonore à la recherche du moindre pic inhabituel et l'on redoute tout autant que l'on espère découvrir dans les oscillation de cette bande sonore de nouveaux indices flippants. Je n'irai pas jusqu'à dire que le film est véritablement angoissant mais il instaure un climat inquiétant qui va crescendo et qui attise une curiosité chez le spectateur tout autant que celle du personnage. On pourra toujours débattre de la légitimité cinématographique de ce type de production mais Josh Criss exploite à fond les ressorts et les codes du found footage dans une approche réaliste et crédible. Aucune musique d'ambiance, une relative légitimité dans le fait de se filmer tant pour tenir un journal de bord que dans une volonté ensuite de capturer des preuves, des plans fixes et posés et pas de type qui saisit sa caméra en plein cœur d'un moment de panique … Bref, ce Leaving D.C. reste de bout en bout crédible dans son approche du genre sans jamais céder une once de cette crédibilité au profit du spectaculaire. Quant à Josh Criss en tant que comédien qui occupe fatalement l'image 98% du temps et bien je le trouve plutôt bon parvenant à nous faire ressentir cette longue montée d'angoisse, voir de paranoïa qui s'installe chez lui après l’enthousiasme béat des premiers instant du retour à la nature. Le film comporte aussi quelques petites péripéties amusantes comme lorsque le personnage un peu lourd espère draguer et conclure avec une amie qui lui rend visite ou qu'en bon américain il part illico se protéger d'un bruit inquiétant en achetant une arme à feu. Le film joue aussi astucieusement sur ce grand retour à la nature finalement plus effrayant que le brouhaha des villes et sur la visible fragilité mentale du personnage qui semble pouvoir perdre pied à tout instant. On pourra bien sûr détester cette forme de cinéma inesthétique et minimaliste au possible, mais au moins l’adéquation entre le fond et la forme est ici quasiment irréprochable et voilà bien pourquoi je lui collerais volontiers un 06/10
Après il faut que le film parvienne à susciter l'inquiétude pour aboutir crescendo vers une vraie terreur et sur ce point ce Leaving D.C. est franchement bien moins convaincant. Si dans un premier temps je me suis retrouvé plutôt captivé par cette histoire et l'exploration de ces foutues bandes sonores, j'attendais et j'espérais que le film réussisse à faire vraiment naître la peur dans une grosse montée d'angoisse. Et même si le Leaving D.C. reste de bout en bout fidèle à sa mécanique anti-spectaculaire de démontrer que la peur peut naître de pas grand chose on termine tout de même le film en se disant : "Pffff franchement tout ça pour ça". Pour reprendre l'exemple du Projet Blair Witch le film se terminait d'une manière terrifiante justifiant à elle seule tout ce qui l'avait précédée et là on a la sensation que le film se termine comme une baudruche qui se dégonfle et que l'exploration du vide n'était au service que de l'exploration du vide. Du pur film de terreur espéré on retombe sur la sensation d'un film de petit malin qui a parfaitement compris tous les codes mais qui n'a au final pas grand chose de plus et encore moins de nouveau à proposer. Je resterai magnanime envers Joss Criss qui a fait son film tout seul, presque pour passer le temps et qui n'était pas dans une démarche mercantile à peu de frais, mais il manque clairement à son film un final traumatisant qui justifierait sa très lente, longue et banale exposition. Voilà bien pourquoi je lui collerais bien 03/10.
Leaving D.C. est un pur found footage avec tout ce que ça implique finalement et mécaniquement de non cinéma. Difficile de reprocher quoi que ce soit à l'entreprise de Josh Criss qui va jusqu'au bout de son concept avec l'intégrité de ne rien lâcher au spectaculaire même si c'est au détriment du plaisir d'un spectateur avide de frisson et qui au bout du compte à un peu la sensation de s'être fait balader pour pas grand chose . Alors 3+6 divisé par deux , ça fait un bon 04/10.