Sacré Shanghai

C'est assez difficile de parler de ce Shanghai, Shanghai (j'aime le titre international, on dirait une chanson jazzy). Non pas parce qu'il y a beaucoup à dire, c'est même le contraire en fait...

Même si j'aime beaucoup Teddy Robin Kwan en tant que chanteur, je dois avouer avoir un peu plus de mal avec ses réalisations, souvent aseptisées et sans grande personnalité à mon goût.
Shanghai, Shanghai n'est pas un très bon film. Ni un mauvais en fait. Il est assez fade quand on y pense, mais quelques qualités bienvenues m'empêchent de lui rester totalement indifférent.

Déjà le casting, c'est du tout bon. La promo a été faite dessus, et on se fout pas de notre gueule. Ce ne sont pas des caméos mais de vrais personnages.
Ça fait très plaisir de voir George Lam (encore un immense chanteur que j'adore mais également un fantastique acteur), dont on a peu de films distribués en France hélas.
Toujours un plaisir de voir Yuen Biao et Anita Mui, toujours impeccables.
Mang Hoi et Lo Lieh aussi, qui ont comme souvent à cette époque un tout petit rôle, mais leur simple présence me fait sourire.
Et enfin Samo Hung, en méchant. Oui oui, et honnêtement c'est vraiment sympa. C'est même ce que je retiendrai le plus de ce film.
J'aime beaucoup son personnage, sontcharisme, ses répliques. Chouette petite surprise de le voir ainsi !

Les personnages globalement sont sympas, mais pas fous non plus, faut bien le reconnaître..
Les dialogues sont bons par contre. Les répliques font mouche. Et j'aime voir ses personnages se lancer des piques et se provoquer.

Non en fait, là où le bât blesse c'est au niveau de la construction du film.
Faute à ses nombreux personnages PRINCIPAUX, le film nous dévoile dès le début 2 intrigues distinctes :
-la première avec Yuen Biao, petit campagnard naïf, qui se retrouve embarqué dans un guerre de gang assez bordélique et pas franchement bien construite.
-la deuxième avec George Lam, colonel de la concession britannique, qui mène une guerre contre ces mêmes gangs et plus tard l'armée révolutionnaire.

Des intrigues qui ont du mal à se succéder, comme si on avait l'impression de voir deux films en un. D'autant que les tentatives de liens entre ces deux histoires parallèles sont assez maladroites..

L'histoire s'éparpille mais ne donne jamais l'impression d'aller bien loin. On nous parle d'armée révolutionnaire, de double jeu, d'inventions loufoques, de trahison, de rise and fall... Et cet amas d'informations, d'idées et de thématiques ne PEUT PAS être convaincant ni correctement développé en juste 1h30...
Et c'est à la limite de ruiner tout le film. Une impression de tanguer par ci, puis par là, sans savoir où on va. Dommage.

A part ça, certaines scènes fonctionnent bien. Les scènes de combats par exemple, efficaces mais vraiment bonnes qu'à la toute fin.
Certains plans sont très beaux aussi. Jamais significatifs de quoi que ce soit, mais beaux. Avec les couleurs, les lumières.. Parfois c'est très joli, et certaines scènes sont vraiment bien pensées (réunion secrète dans une teinturerie à l'atmosphère onirique ou encore cette formidable scène de danse/Kung Fu)
L'ambiance de Shanghai des années 30 est vraiment agréable, et sur ce point ça fonctionne carrément.
Cette ambiance fait d'ailleurs bien sûr penser à Miracles (aka Big Brother, aka Canton Godfather, aka Mr Canton and Lady Rose, aka Le film de Jackie Chan qui dirige un cabaret sur fond de guerre de gangs) sorti 1an plus tôt.

Mais, blockbuster HK de l'époque oblige, on se retrouve avec des romances assez forcées et terriblement pas convaincantes. Quelques passages niais assez bêtes.
Un méchant Kirk Wong, encore, avec TOUJOURS le même rôle. Un peu lassant, d'autant qu'en vrai Kirk Wong est adorable.
Et enfin, quelques passages grotesques avec notamment cet ersatz de Billy Lau lourdingue (même s'il est sadiquement satisfaisant de le voir s'en prendre plein la gueule durant tout le film).

Avec une histoire assez mal fichue, des idées mal exploitées, un rythme vraiment aux fraises et un petit manque d'identité, on peut reprocher bien des choses à ce Shanghai, Shanghai.
Et on ne peut pas tout lui pardonner, même si ses quelques qualités nous font tout de même passer un bon moment.
A la fin, on garde quand même un goût amer.. On espérait plus de folie, plus de punch.

Encore une fois, Teddy Robin Kwan nous offre une œuvre relativement aseptisée, mais digeste. Sans grande saveur hélas.

Je met un 6 plutôt que le 5 prévu à la base, parce que ses 10 dernières minutes sont vraiment réussies et donne un aperçu de ce que le film aurait pu être s'il s'était vraiment lâché.