A New York, de jeunes gens frais émoulus des grandes universités américaines tentent de s’insérer sur les marchés professionnel et matrimonial. Le soir, ils se rejoignent au Club où ils se tournent autour tout en échangeant sur la vie, l’amour et la morale des dessins animés. Le film se fonde notamment sur une opposition entre Alice, femme de tête, à qui il est reproché de repousser les hommes faute de ne pas déguiser son esprit critique, et Charlotte, demi-mondaine, qui joue la carte de la futilité pour séduire. Pour incarner ses deux héroïnes, Whit Stillman a choisi des actrices complémentaires : Kate Beckinsale est une une machine à reparties fulgurantes, tandis que Chloë Sevigny exprime une palette de réactions nuancées sur son visage qu’il peut filmer longuement. Les deux ont la trempe suffisante pour incarner des jeunes femmes qui ne s’en laissent pas conter par les hommes. Face à elles, ceux-ci paraissent bien falots, et leur désemparement devant les avancées du féminisme n’est pas le moindre des effets comiques.
Grand nostalgique des années disco et de la vie de groupe qu’elle encourageait, Stillman reconstitue leur ambiance « musicale et sociale ». Cela confère au film un décor chatoyant et une B.O. dynamique. En dehors de ces éléments sympathiques, le film vaut surtout pour la qualité des dialogues, pleins d’esprit et de férocité. A travers eux, le réalisateur dessine un portrait réaliste et touchant de jeunes new-yorkais « urbains et professionnels » tiraillés entre l’envie de suivre leurs valeurs profondes et le désir de gagner en popularité dans le groupe pour se rassurer face à la peur de la solitude. Il s’amuse à faire subir à chacun de ses personnages une expérience initiatique qui l’oblige à mettre ses théories à l’épreuve de la réalité, notamment en matière de liberté sexuelle. Néanmoins, bonhomme avant tout, il réserve à tous une happy end, clôturant sur une touche d’optimisme sa comédie de qualité.