Les Marais de la Haine (Gator Bait) est un petit film d'exploitation du début des années 70 et plus précisément un fleuron de la Hicksploitation, ce courant cinématographique relativement peu connu qui met essentiellement en scène ces ruraux dégénérés de l'Amérique profonde plus communément appelés rednecks. Le film est réalisé à l'arrache et en dix jours chrono par le couple Ferd et Beverly Sebastian, monsieur s'occupant également de la musique couleur local et de la photographie très naturaliste alors que madame est aussi scénariste.
Gator Bait raconte la traque d'une jeune fille prénommée Désirée vivant dans les marais de Louisiane avec son frère et sa soeur et qui se retrouve accusée à tort du meurtre d'un péquenot du coin. Aidé du shérif local et de son fils d'adjoint, le père de famille avec ses deux derniers rejetons entreprend alors une expédition punitive afin de venger la mort de son fiston chéri.
Les Marais de la Haine est un mélange de survival et d'éléments proches de rape and revenge puisque techniquement le film ne comporte aucun viol véritable mais plusieurs tentatives. Bien moins crapoteux que ne pouvait le laisser entrevoir à priori son équation rednecks + vengeance + viol, le film s'oriente surtout vers le thriller rural et le survival marécageux. Toutes proportions gardées le film pourra même par certains aspect faire penser à un vieil ancêtre féministe de Rambo surtout lorsque les cinq mâles venus pour chasser Désirée comprennent que ce sont finalement eux les proies d'une jeune femme capable de fabriquer des pièges (parfois un peu foireux) et qui surtout possède une parfaite connaissance du terrain. Même si l'ensemble n'est pas d'une intensité des plus palpitante et que le film se perd parfois dans des séquences qui reviennent trop en boucle jusqu'à devenir lassantes comme les poursuites en bateau sur les marais, Les Marais de la Haine reste une série B tout à fait fréquentable.
Le film doit aussi beaucoup aux charmes de son actrice principale, l'ancienne playmate Claudia Jennings qui n'est sans doute pas la plus extraordinaire des comédiennes mais qui possède un véritable charisme et une forte présence à l'écran. Jeune fille indépendante et bien badass c'est un plaisir de la voir entre sauvageonne et mère de substitution protéger ses proches tout en dégommant les hommes qui lui souhaite du mal. Les Marais de la Haine restera malheureusement l'un de ses seuls et derniers grand rôle à l'écran puisque la comédienne se tuera tragiquement dans un accident de voiture avant de dépasser la trentaine.
Le reste du casting n'est pas franchement mauvais non plus même si parfois les comédiens ont tendance à surjouer un peu. Mais surtout le scénario dépasse un petit peu les archétypes d'un seul bloc pour donner un peu d'épaisseur à chaque personnage loin de la simple caricature du bouseux crétin, inculte et cradingue. Le shérif possède un background plutôt émouvant avec la mère de Désirée, un des rednecks va dépasser ses pulsions purement sexuelles en allant jusqu'à vouloir épouser sa victime et un autre (dont Désirée à couper les roustons après une tentative de viol) trouvera dans le bout de son canon de fusil un substitut à sa virilité défaillante … On est évidement pas dans l'étude de mœurs pointu mais un poil au dessus également d'un simple antagonisme entre gentille victime et vilains péquenots.
Les Marais de la Haine est donc une bonne petite série B d'exploitation, certes le ne propose rien de mémorable mais se laisse regarder sans soucis.
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