Rêves effrités, bonheur en miettes, illusions perdues sous le fracas du bleu d'une non-vie. Quel est-il le bonheur ? Danser à en perdre la possession de son existence, s'échapper grâce aux songes, gélules de poussières, étoiles qui vrillent dans les bouches qui ne cessent de s'ébattre, de s'abattre. Salives qui se mélangent et peaux qui s’effritent le temps d'une étreinte, d'un échange, d'un songe.
Les Paradis Artificiels semble flotter au dessus du ciel, en apesanteur. Vie fantasmée, désirée. Bonheur illusionné. Existence fait de rêves, de miettes, de corps, de chaleur et de son qui s'échappent des basses trop fortes, par la chaleur volcanique d'un pays qui ne connait pas le gel.
Ainsi parmi ce flot de corps, de bruit, de vie, il n'y a plus de nuit. Il y a le jour, asphyxiant, de trop de soleil, de trop de jour, de trop de lumière. Le ciel semble d'un bleu irréel. Brésil la belle qui chante par trop d'extase.
Le film est atteint d'une maladie chronique, inaltérable : celle d'être sans cesse en lévitation, jusqu'à inscrire le désir des images dans la face des spectateurs, à la manière de Spring Breakers.
Le film apparaît comme un clip parfois trop lisse, trop parfait, trop beau. Sentiment dû probablement à une musique qui jamais de cesse, qui semble flotter en même temps que l'envoûtement de ces images, donnant au film le rythme effréné de tout un film. Semblable alors à cet autre film Before I Disappear, où la musique quasiment omniprésente semble dicter les errances d'un drogué paumé dans la nuit de New York.
C'est un clip esthétique et langoureux, à la manière d'un Dolan, qui cherche son euphorie dans l’atmosphère langoureuse de corps qui se chevauchent, de vie qui se cherche, danse, dans le brouillard d'un monde englouti dans sa propre perdition.
Perdition d'illusions, les paradis artificiels d'un bonheur noir, inexistant, vide de sens.
C'est le poids d'une non-vie. La noirceur d'une existence qui n'arrive pas à être autrement que par l'alcool, l'artifice des petites pilules qui font que tout devient couleur, langueur, artifice.
Ce sont des êtres qui sont incapables d'exister. Alors ils fuient face à la peur. Le néant, l'artifice, les couleurs, la vie. La peau dans la nuit, les sueurs qui dégoulinent des corps asphyxiés de nuit, brumeuse allégorie du bonheur.
Beauté irréelle de ces corps, de ces peaux en gros plans, de ces seins qui fondent entre les mains des hommes, de ces clavicules, de ces dos, flou des images qui jaillit par trop de drogue dans les poumons. Alors les images deviennent immenses, irréelles, bleues et langoureuses. Le spectateur est drogué par un flot ininterrompu d'images, comme ces êtres qui cherchent une issue, mais qui ne la trouve pas. Le film nous amène en lévitation, très haut vers la lune, un peu à la manière de Enter the Void. Plongée psychédélique et esthétique, langoureuse langueur, pour nous laisser là, transpirant, chancelant.
Le spectateur est cet être drogué qui sort d'un film, au final trop esthétique, trop artificiel, trop clip. Mais c'est une jolie plongée dans le noir inaltérable de l'existence.