Salem's Lol
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Tobe Hooper est très habile pour mettre en scène une horreur d’intérieur – on pense au train-fantôme et à son dédale de pièces glauques (The Funhouse), à la maison de Leatherface (The Chainsaw Massacre) ou celle de Caroll Anne et sa famille (Poltergeist) – qui transforme l’environnement extérieur en une somme de signes à déchiffrer et dont l’interprétation laisse sentir l’omniprésence du mal. Cette interpénétration des espaces, Salem’s Lot la réussit fort bien et trouve là l’une de ses qualités essentielles : un manoir délabré perché sur un vallon, un antiquaire vêtu de noir aux apparitions suspectes, des morts qui s’enchaînent, un cimetière dont les tombes creusées attirent à elles les vivants.
Le manoir – qui reste, pendant les deux tiers de l’œuvre, un personnage vu de l’extérieur – est un moyeu autour duquel gravite un mystère : le téléfilm s’ouvre sur Ben Mears contemplant, non sans effroi, ledit manoir sur lequel a vue la fenêtre de la chambre de l’étranger, ou plutôt de l’exilé revenu dans sa ville natale. Aussi le bâtiment apparaît-il d’emblée comme un motif obsessionnel dans la conscience de celui qui gagne sa vie en écrivant de la fiction, mais une fiction nourrie de réalité ; il est un avatar de la création, de cette œuvre en devenir et qui demeure inaccessible, qui fascine autant qu’il rebute. Le manoir symbolise le retour au pays natal pour un écrivain soucieux d’extérioriser ses démons intérieurs et ainsi espérer les mettre à mort : ainsi, l’enseignante rencontrée sur une pelouse est en train de lire l’un de ses romans, préfigure en somme une compagne de substitution qu’il faudra, le temps venu, accepter de perdre une fois encore.
En adaptant Stephen King, Tobe Hooper pense la fiction comme conservatoire de la douleur de celui qui écrit et recréation – par la récréation que garantissent ici les vampires – d’une réalité imaginaire où le mal est amplifié et devient concret, physique, un ennemi à affronter à l’aide de croix, d’eau bénite et de pieux. Néanmoins, le format adopté par le téléfilm – deux parties, trois heures au total – contraint l’ensemble à longueurs et répétitions, échoue à faire évoluer les enjeux de ses protagonistes une fois les bases posées, jusqu’à une dernière demi-heure efficace et aux décors somptueusement repoussants. De bons effets spéciaux, à l’ancienne, confèrent à l’ensemble une authenticité appréciable, faisant de Salem’s Lot une curiosité ni essentielle ni désagréable.
Créée
le 18 juin 2020
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