Just a girl
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Après son vrai faux documentaire qui avait étudié avec ironie la retraite de Joaquin Phoenix, Casey Affleck retourne enfin derrière la caméra avec le dénommé Light of my Life. Un film post apocalyptique aux traits fins et d’une sincérité débordante.
Il est souvent difficile pour un acteur d’affirmer sa personnalité filmique notamment lorsqu’il faut éloigner de son processus créatif les influences qui ont parcouru sa carrière. Lost River de Ryan Gosling, où le fantôme de Nicolas Winding Refn erre avec persistance, est représentatif de cette difficulté émanant de la construction personnelle d’une oeuvre pour ne pas tomber dans le quelconque. Cependant avec le petit dernier de la fratrie Affleck, les influences se font visibles, même tangibles mais n’enlèvent en rien à la qualité du film.
Lors du visionnage de Light of my Life, on ressent la présence de Gerry de Gus Van Sant par le biais de l’errance et le road movie cathartique qui entoure les deux personnages, on se remémore avec douceur le cinéma de David Lowery grâce à cette mise en scène sophistiquée, puis par le mutisme et l’amour inconsidéré qui évoluent entre ce père et sa fille, tout en se rappelant le décorum post apocalyptique de The Road de John Hillcoat et la fuite naturaliste de Leave No Trace de Debra Granik. Ça semble faire beaucoup pour un seul film, pourtant Casey Affleck arrive à tirer son épingle du jeu, sans bien évidemment révolutionner le genre qu’est celui du post apocalyptique.
De David Lowery, assurément, Casey Affleck garde avant tout cette démonstration de force qui consiste à étirer les scènes pour en faire des moments suspendus : avec par exemple la première scène de Light of my Life et cette comptine racontée par le père à sa fille, qui rappelle la scène de la tarte de Rooney Mara dans Ghost Story. Scène semblant anecdotique, fortement anesthésiée et longue, mais qui contient toutes les thématiques importantes du film : l’amour parental, l’écoute mutuelle et surtout un questionnement sur la mise en sourdine de l’opinion féminine qui nourrit malheureusement la vraie fausse héroïsation de l’homme.
Avec cette obsession-là, le cinéaste tient bon et se dépêtre de toute cette expérience d’acteur pour livrer un film âpre, assez désarçonnant, sur l’amour qu’il peut y avoir entre un père et sa fille tout en analysant les sacrifices et les dérives qui peuvent en découler, et y insère avec justesse (ou culpabilité au regard des scandales qui entourent l’acteur) un discours pertinent sur la masculinité toxique, l’échec d’un père à vouloir tout contrôler et la violence omniprésente qui provient de l’homme, au sens masculin du terme. Light of my Life se situe dans un contexte où une pandémie a ravagé le monde et a tué toutes les femmes de la planète, et de ce fait ne restent que les hommes, exceptées peut être certaines femmes dont la jeune Rag (la fille) qui a contracté une auto immunité. Le père va donc tout faire pour cacher sa fille et la protéger d’un monde masculin en perdition qui n’est pas si éloigné du nôtre.
Film post apocalyptique linéaire, dévoilant quelques secousses de violences sèches et une sublime complicité père/fille, où les deux personnages ne font que se cacher du reste du monde enneigé, allant de maison délabrée en maison délabrée, se battre pour survivre, pour la nuit venue, discuter sous les lueurs d’une bougie, Light of my Life est aussi le portrait d’un père, hanté par la mort de sa femme, mais dont le code d’honneur et la force physique ne suffiront pas à sauver sa fille. Car c’est bien elle la clé de cette « Love adventure » , et non lui.
Créée
le 2 sept. 2020
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