Madagascar
6.2
Madagascar

Long-métrage d'animation de Eric Darnell et Tom McGrath (2005)

Avec Fourmiz (souvent oublié), la saga naissante de Shrek (qui en était alors à deux opus) et Gang de Requins, DreamWorks commençait sérieusement à se faire un nom dans le domaine du cinéma d’animation, bien que le niveau était encore bien loin de celui de Pixar. Alors que le studio ayant donné naissance à Toy Story et consorts ne pensaient qu’en termes d’originalité et de poésie, celui de Shrek ne misait que sur les gags et les références. Un fossé énorme que leur nouveau-né de 2005, Madagascar, avait creusé de plus belle !

Rien que sur le papier, ce long-métrage n’avait pas grand-chose de folichon à nous proposer. Juste une trame de divertissement pour enfant tout ce qu’il y a de plus classique, à savoir l’évasion des animaux d’un zoo désireux de retrouver la vie sauvage. Ni plus ni moins ! Le tout ne servant que de prétexte à présenter des personnages hauts en couleurs (un lion starlette, un zèbre funky, une girafe hypocondriaque et un hippopotame brut de décoffrage) accompagnés de seconds couteaux à la limite du cartoonesque (les pingouins et les lémuriens) et proposer au public tout un lot de gags pour faire rire. Même si le film en question arbore ce statut hautement classique, il peut se montrer efficace et faire passer un agréable moment en faisant oublier son manquer d’originalité. Madagascar se présente comme un long-métrage d’animation qui n’a pas réussi à atteindre ce niveau.

La faute principalement à un scénario incroyablement vide. Un foutoir de vannes et de situations rocambolesques qui ne cessent de tomber du ciel, qui n’a tout simplement rien à raconter. Le pitch du film (l’évasion de nos héros) est bien là, mais n’occupe qu’un tiers de l’ensemble, le reste donnant l’impression de n’être que de la décoration pour justifier une durée de 1h26 et de ne pas posséder le statut de court-métrage. Au menu : des personnages qui sautent dans tous les sens à en devenir véritablement soûlants (Alex et King Julian en tête), des répliques humoristiques qui mettent rarement voire jamais dans le mille pour le public adulte et qui flirte souvent avec le caca prout (« manger des excréments » et « il a croqué mes meules » comme running gags, franchement les mecs…), des protagonistes sans aucun charisme ni travail d’écriture convenable (ils n’ont juste que les caractéristiques déjà évoquées plus haut)… là, c’est un peu prendre les enfants pour des débiles profonds ! Certes, ils trouveront ça divertissant et amusant, mais même eux sont habitués à bien mieux (il suffit de voir les Disney et, encore une fois, les Pixar).

À cette incroyable hystérie s’ajoute également la paresse qui s’est présentée à toute l’équipe du film. Encore une fois les scénaristes, mais également aux directeurs d’animation, qui ont livré un visuel certes beaucoup agréable que Gang de Requins (faire pire aurait été un exploit) et très coloré, mais assez grossier, aux traits anguleux manquant de détails. Qui ont réussi à rendre un film hystérique aussi mou que du chewing-gum question énergie visuelle, vu que Madagascar semble manquer de mise en scène. Même le compositeur Hans Zimmer parait absent de ce projet, lui qui s’est déjà essayé à la composition de films d’animation en livrant les somptueuses musiques du Roi Lion et de Spirit : l’Étalon des Plaines. Ici, ses partitions ne s’entendent qu’à peine et n’ont rien de mémorables, parasitées par la reprise d’une multitude de chansons connues dont I Like to Move It de Reel 2 Real. Pour avoir une ambiance digne de ce nom, passer votre chemin : Madagascar n’en a aucune !

Il ne reste qu’à Madagascar que sa bonne humeur pour séduire les plus jeunes (malgré un humour bas de gamme) et la troupe des pingouins, les vraies stars comiques de ce film qui arrivent à capter l’attention, même si nous sommes encore bien loin du fou rire à la Scrat. Il n’empêche, ce film d’animation, à mon sens, ne mérite aucunement son succès et pique ainsi la place à d’autres films d’animation plus réussis que ce produit sans âme et purement commercial. Une bonne raison pour aimer Pixar et Blue Sky plutôt que DreamWorks !

P.S. : maintenant que le film est critiqué, je voudrais m’attarder un peu sur le doublage français (ne l’ayant vu que dans cette version), vu que cela n’affecte pas le long-métrage. Je trouve lamentable que les réalisateurs des versions françaises ne jurent désormais que sur la prestance du casting vocal des films d’animation pour attirer un public plus mature. Si parfois ça marche (encore une fois, les Disney), ça se vautre dans le cas contraire. Madagascar est l’exemple-type d’un casting regroupant des célébrités qui n’ont rien à voir avec le doublage (José Garcia, Anthony Kavanagh, Jean-Paul Rouve, Marina Foïs) et qui pique la vedette à de vrais professionnels (Roger Carel, Richard Darbois, Céline Monsarrat…), bien meilleurs et arrivant à donner toute la crédibilité et les émotions des personnages. Ici, les personnages n’ont pas voix, c’est le cas de le dire ! On n’y croit pas une seule seconde et ça enlève un charme qui aurait pu rendre les protagonistes légèrement plus attachants. Vraiment lamentable…

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